C’est la guerre des boutons !

septembre 2011
Dans huit mois, c’est le 1er tour des élections présidentielles. Derrière les joutes politiciennes s’ouvre une année aux choix déterminants.

enquete_88.jpg« Tout est ouvert. Cette année est passionnante », trépigne d’impatience Bernard Reynès. « Je m’attends à huit mois de combat », s’enthousiasme Sophie Camard. Quel rapport entre le premier, 58 ans, député UMP des Bouches-du-Rhône, membre de la droite populaire, et la seconde, 38 ans, conseillère régionale Europe écologie ? Réponse : une année électorale déterminante sur l’échiquier politique français. Dans huit mois, le 22 avril, aura lieu le 1er tour des présidentielles. Le compte à rebours est largement entamé.

« Rien n’est fait. Nous pouvons très bien revivre un 21 avril, où la gauche a été éliminée au 1er tour, comme un 21 avril inversé, au détriment de la droite, ou bien un duel plus classique UMP contre PS au 2ème tour. J’étais très pessimiste il y a trois mois, je le suis moins aujourd’hui », poursuit Bernard Reynès. Et Sophie Camard d’exprimer, de son côté, un point de vue personnel mais largement partagé par de nombreux militants : « La présidentielle, c’est l’élection que je déteste le plus, celle qui fait croire qu’elle va tout régler, qui personnifie à outrance les enjeux. Mais je ne vois pas malheureusement comment s’en priver. »

Il y a un côté « guerre des boutons », un tantinet enfantin, dans les joutes politiciennes qui débutent durant lesquelles s’affrontent les ambitions des uns, les logiques d’appareil des autres, les stratégies des communicants, l’agitation médiatique autour de la dernière petite phrase de tel ou tel prétendant. Observateurs privilégiés des mœurs politiques locales, à la lecture des professions de foi et des communiqués de certains candidats, au retour de meetings, de conférences de presse et autres réunions publiques, comme le « petit Gibus » de La guerre des boutons, le film d’Yves Robert, nous avons parfois envie de crier, avec l’armée de l’ombre des abstentionnistes : « Si j’aurais su, j’aurais pas venu ! »

Et pourtant, les enjeux sont nombreux. Le président de la République, qu’on s’en réjouisse ou qu’on le déplore, concentre les pouvoirs sous la 5ème République. Nicolas Sarkozy, de par sa pratique, renforce encore cette tendance. Le succès ou l’échec des formations politiques qui se présentent au 1er tour, même si elles n’ont aucune chance de faire élire leur poulain, est déterminant pour les législatives qui suivront aussitôt et dont le résultat conditionne le financement des partis. En clair : la présidentielle donne le ton des rapports de force politiques pour les 5 années à venir.

D’où la bousculade généralisée. Tout le monde doit se compter pour espérer exister : UMP, PS, écologistes, front de gauche, centristes, extrême gauche… Sans oublier Marine Le Pen et l’extrême droite déterminés, comme c’est le cas depuis bientôt 30 ans, à imposer dans le débat public leurs obsessions xénophobes ainsi que leurs solutions sécuritaires et inégalitaires. L’ampleur du score de Marine Le Pen sera proportionnelle à la capacité, ou l’incapacité, des autres forces politiques à mobiliser ou non les électeurs.

Les attentes exprimées par le grand mouvement social l’an dernier et les « Indignés » un peu partout en Europe vont-elles trouver une traduction politique ? Face à la crise, un autre modèle de société peut-il émerger, moins destructeur des équilibres sociaux et écologiques ou bien la potion amère de la rigueur est-elle la seule possible ? A gauche, les promoteurs d’une alternance gestionnaires pèseront-ils plus que les adeptes d’une alternative réformatrice ? A droite, qui va emporter la mise entre les partisans d’une radicalisation doctrinaire et ceux soucieux de ne pas rompre le dialogue avec le centre ? Quelques questions et enjeux de fond en toile… de fond du grand cirque de la politique spectacle.

Michel Gairaud

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