Le PS à la recherche de l’électorat populaire

novembre 2011
Terra Nova a sorti en mai dernier une note préconisant au PS d’abandonner son électorat ouvrier. La proposition a aussitôt provoqué un tollé chez les socialistes. Que pensent-ils aujourd’hui, en début de campagne présidentielle, dans la région ?

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« Le rapport de Terra Nova est une connerie, c’est du calcul à court terme ! L’électorat populaire est un vrai enjeu. Les ouvriers et les employés sont majoritaires et ils représentent nos valeurs. » Ce serait un doux euphémisme de dire que Xavier Garcia, porte parole « hollandais » du PS des Alpes-Maritimes, a peu apprécié le travail de Terra Nova, publié en mai dernier, proposant aux socialistes d’abandonner l’électorat ouvrier, censé s’être déplacé vers l’UMP et le FN, pour se recentrer sur les classes moyennes, les jeunes et les femmes…

Il n’est pas le seul. A l’exception de Jean-David Ciot, nouveau premier secrétaire de la fédération des Bouches-du-Rhône et soutien de Martine Aubry, qui « partage à moitié l’analyse » du think tank proche de DSK, les autres fédérations socialistes de la région, quel que soit leur poulain pour les primaires, rejettent elles aussi en bloc les conclusions de Terra Nova. Pour Claude Haut, sénateur du Vaucluse, le programme du PS mériterait au contraire d’être plus attentif aux classes populaires. « Il en parle un peu, mais il serait à affûter. Je pense qu’il faut un regard très précis sur la précarité », explique le président du Conseil général. « Avec la crise, il faudrait prendre des décisions qui déplaisent au patronat. Mais les candidats aux primaires socialistes préfèrent se donner une image de bons gestionnaires », tacle Jean-Marc Coppola, vice-président communiste du Conseil régional.

François Hollande cultive particulièrement cette image. Une de ses principales propositions en matière économique est « la réduction du déficit à 3 % en 2013 ». « Il propose également une réforme fiscale qui comprend une redistribution différente des recettes et la taxation des revenus du capital, ainsi qu’une fiscalité et un budget européens. Pour lui, l’Europe doit être la solution », complète pour sa défense Xavier Garcia. Sur l’emploi et le maintien du système social ou de pouvoir d’achat, priorités des Français, le favori des sondeurs est par contre plus discret. Jusqu’à confirmer la fin de la retraite à 60 ans et taire la question du non remplacement d’un fonctionnaire sur deux cher à Nicolas Sarkozy. Le député de Corrèze est également très en retrait du corpus idéologique de l’UMP et du FN. Au grand désespoir du porte parole de la fédération des Alpes-Maritimes : « L’immigration, la sécurité et la nation sont des thèmes très importants pour les classes populaires, mais j’ai conscience que je suis minoritaire sur ces questions. »

« Je serai la présidente de la sécurité »

Pas tant que ça ! Lors de son déplacement surprise à Marseille, en parallèle à celle du ministre de l’Intérieur Claude Guéant, Martine Aubry a annoncé la couleur : « Je serai la présidente de la sécurité. » Dans ce domaine, ses propositions, qui reprennent d’une manière générale le programme du PS, sont nombreuses. Est prévue, notamment, « la création de 10 000 postes de gendarmes et de policiers sur cinq ans ». La maire de Lille ne drague pas que le populo ! « C’est un programme de reconquête, autour de l’idée d’égalité réelle. Lorsque l’on parle de sécurité, il s’agit également de la sécurité sociale et de l’égalité des chances par rapport à toutes les insécurités. D’où nos propositions de mettre des moyens sur la sécurité publique, la justice et l’école. J’estime que la crédibilité du PS se joue sur ces questions », explique le Marseillais Jean-David Ciot. Par contre, Martine Aubry ne se distingue ni sur le pouvoir d’achat ni sur le système social. Quand à l’emploi, elle le réserve aux jeunes.

Cette jeunesse, en particulier celle en difficulté, c’est un des dadas de Ségolène Royal. « Elle souhaite lui offrir des perspectives », insiste Cécile Alzina, coordinatrice de Désirs d’Avenir 13. Et de détailler : « Elle propose des bourses « Désir d’entreprendre », le développement de l’apprentissage et des incitations pour les entreprises qui embauchent des jeunes. » La présidente de la Région Poitou-Charentes est par contre moins généreuse avec les étrangers. A l’image de l’UMP et du FN, elle envisage de suspendre les accords de Schengen. Elle refuse également le droit de vote aux étrangers aux élections locales. Ségolène Royale n’est pas non plus très prodigue sur le pouvoir d’achat : même pas de coup de pouce au SMIC dans ses propositions ! Est-ce bien très populaire ? Son déplacement dans les quartiers Nord de Marseille le 16 août à l’appui, Cécile Alzina insiste : « Ségolène est la porte-voix de ceux qui n’ont pas droit au chapitre, elle ne laissera pas les quartiers populaires à l’abandon. »

Vice-présidente de la Région et première secrétaire de la fédération PS du Var, Mireille Peirano livre une évolution récente du PS, qui en dit certainement plus que son programme, ou ceux des candidats à ses primaires, sur son rapport aux classes populaires : « L’ensemble du parti a fait un travail intéressant pour que l’action militante retourne chercher cet électorat qui ne vote plus. Il y a des formations aux campagnes classiques, comme le porte-à-porte. » Il était peut-être temps…

Jean-François Poupelin

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