Moi, Jean-François Collin, chevalier de l’OAS

janvier 2012
Ancien de l’Organisation armée secrète et actuel président de l’Adimad, une association qui prône la réhabilitation des morts au combat de l’OAS, Jean-François Collin est dragué par Nicolas Sarkozy. Lui, l’exècre. Ce qui, néanmoins, ne rend pas plus sympathique ce pur militant d’extrême droite... Portrait satirique.

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(Hyères-les-Palmiers, fin août. Jean-François Collin reçoit quelques amis de l’OAS et du FN. Ca discute bon vieux temps, mais pas que. L’air est chaud, le rosé frais. Et du Var !) Ah ah ah ! Vous avez vu le Gaudin cet été les amis ? Sifflé aux festivités de Carnoux (1) comme un vulgaire communiste ! Il croyait quoi le gros maire de Marseille en recevant début juillet la terroriste algérienne Zohra Drif ? Que les camarades allaient lui sauter au cou ?

Il fait comme son patron Sarkozy. « Je ne l’aime pas, c’est un gaulliste » (2), mais il me drague pour piquer des voix au FN. Gérard Longuet (3) vient de m’élever au grade de chevalier de la légion d’honneur ! Avec traitement, s’il vous plaît ! Motif : mutilation pendant la guerre d’Algérie ! La rigolade ! Tiens, on va fêter ça ! Ressers-nous, Théo (4).

(Les verres trinquent, les bouches lapent bruyamment. La vieillesse…) J’ai bien été blessé pendant mon service dans les paras, en 1960, mais y’a prescription. Ma guerre d’Algérie, c’était plutôt les copains de Jeune Nation (5), l’Organisation armée secrète, le putsch des généraux, la tentative d’assassinat d’Yves Le Tac (6) et, pour finir, les geôles de « la grande Zohra » (7). Bilan : 2 200 tués ! Beaucoup de crouilles, quelques sbires gaullistes. Mon général à moi, c’est Salan (8) ! C’était la belle époque, hein, Jean-Jacques (9).

« Mon général à moi, c’est Salan ! »

Après, ça a été l’armistice contre un coup de main pour mettre fin à la « chienlit ». Puis la reconversion, les affaires, florissantes. Comme quoi. Toujours un peu de politique aussi : le Parti nationaliste français, puis le FN, le seul parti qui nous soutienne ouvertement. Conseiller municipal à Hyères c’était sympa, mais loin de mon combat. Moi, je suis né rue d’Isly, où De Gaulle a fait tirer sur son peuple le 26 mars 1962 ! Heureusement, qu’il y a notre association amicale pour la défense des intérêts moraux et matériels des anciens détenus politiques et exilés de l’Algérie française. Mon Adimad ! Une asso apolitique, naturellement. Pour preuve, j’ai abandonné mon mandat quand vous m’avez élu président en 2003. Bon, j’ai replongé pour les cantonales de 2004 et je me tiens toujours au courant. Aux dernières municipales, j’ai appelé à voter contre le gaulliste Girand (10) à Hyères, deux ans plus tard j’ai soutenu la Ligue du Sud de Bompard (11) aux régionales et sur un coup de tête j’ai repris ma carte au FN pour voter pour Gollnisch (12) au congrès de Tours, en début d’année (13). Rien de politique, j’aime pas Marine…

En tout cas, c’est pas Sarkozy qui va faire avancer les choses. Il y a quatre ans, il nous avait déjà caressés dans le sens du poil. C’était fin de la « repentance » et promesses à tout va. Il nous a même reçus à la veille du premier tour avec d’autres associations de rapatriés. A vomir ! Vous vous souvenez ? « Il a enlevé ses chaussures, et s’est gratté les mollets avec ses doigts de pied » (14)…

Résultat, wallou ! Les défilés, les commémorations ou les bidules (15) comme la Fondation pour la Mémoire de la Guerre d’Algérie, ça va un temps. On arrive à installer des stèles en hommage à nos combattants, comme à Marignane cette année, mais on ne peut même pas y inscrire ce que l’on veut (16) ! Je ne vous apprends rien, à part la petite Tabarot du Cannet (17) – oui Jean-Jacques, la fille de Robert, notre trésorier à Oran -, y’a rien à attendre des gaullistes, populaires ou non, à part des belles paroles ! Ressers-moi, Théo.

« Sarkozy s’est gratté les mollets avec ses doigts de pieds »

T’as raison. Evidemment, depuis Mitterrand et son décret rétablissant nos généraux putschistes dans leurs droits, on a jamais été aussi bien soutenus. Je crache pas sur notre victoire idéologique ou sur l’indemnité forfaitaire (et non imposable !) qu’accorde le trop méconnu article 13 de la loi de février 2005 à nos amnistiés. Et puis, on est pas trop mal dans le coin (18). Mais ça suffit pas. Merde ! « Nous sommes des patriotes, […] nous avons défendu la constitution contre le machiavélisme de De Gaulle » (19). « Nous étions tous des résistants » (20) ! Les camarades dézingués en Algérie ou assassinés à la suite de jugements d’exception ne sont, eux, toujours pas reconnus « Morts pour la France » ! « On est toujours des parias et des citoyens de seconde zone ! » (21)

Y’a même danger. Si les socialo-communistes repassent au pouvoir, ils vont nous imposer d’honorer tous les morts de la guerre d’Algérie comme le propose Gavoury (22). « Avec les fellouzes ? Les terroristes du FLN ? Les porteurs de valise ? Ceux qui nous ont massacrés, qui ont détruit nos maisons, nos cimetières ? » (23)  Nardinamouk ! Sûr, je vote Marine en mai prochain ! De toute façon, j’allais pas voter pour la petite Zohra. Allez, santé !

(Ses invités, en chœur et hilares : et pas des pieds… noirs !)

Georges

Dans le prochain Ravi, daté février, grande enquête sur la guerre des mémoires, les "nostalgériques", à l’occasion du 50ème anniversaire de l’indépendance de l’Algérie. Pour ne pas rater ce numéro et les suivants, abonnez-vous, c’est par ici !

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