LGV PACA : Le débat public cherche sa voie

avril 2005
Le débat public sur la LGV va se poursuivre jusqu'à fin juin. Mais il a pour l'instant du mal à trouver sa voie...

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En attendant le prochain wagon de réunions

« On a parfois l’impression de faire face à un dialogue de sourds, regrette Philippe Cretin, responsable de la Fnaut-Var (Fédération nationale des usagers des transports). Réseau ferré de France (RFF) a déjà un scénario en tête. Les associations font semblant de l’ignorer. Les politiques disent “nous sommes les payeurs alors nous décidons !” » Du côté des élus, chacun s’accorde sur la réelle opportunité de la construction d’une ligne à grande vitesse vers l’Est de la région. Tous se retrouvent pour dire que la LGV Paca est un enjeu fort, en termes de développement économique, d’aménagement du territoire et d’alternative à la saturation des différents modes de transports locaux (route, air et rail). Et s’efforcent, au moins publiquement, de gommer leurs divergences sur le tracé et leurs interrogations sur le financement… C’est que Thierry Frémont, le préfet de région, n’a pas manqué de rappeler les conséquences des divisions : « des dissensions ont déjà entraîné l’abandon du prolongement du TGV Méditerranée vers le Var et la Côte d’Azur dans les années 1990 ».

Une inquiétude que partagent également les associations attachées au développement des transports en commun et à un rééquilibrage en faveur du rail. « Si les pro LGV n’arrivent pas en bon ordre, le projet va exploser », estime Philippe Cretin. Tout en souhaitant que la LGV aboutisse, la Fnaut souhaite que cela ne soit pas à n’importe quelles conditions. Nuances que ses responsables souhaiteraient pouvoir exprimer lors du débat. Possibilité qui ne s’est pas encore vraiment présentée. « La position des politiques est très tranchée, beaucoup trop pour un débat… », déplore par exemple Jacques Faliers, de l’Association de sauvegarde de l’environnement de Cuges, lors de la réunion de lancement de Marseille. Au point d’évoquer une « mascarade ». Une position que n’est pas loin d’approuver Claude Jullien, délégué régional de la Fnaut Paca. « Malgré les bonnes intentions de la commission, déplore-t-il. Animer un débat avec des milliers de gens, tout en permettant, en théorie, que tout le monde s’exprime, est un sacré pari. Car tout le monde n’a pas le même poids ! » RFF et la commission ont beau rappeler que rien n’est décidé, le soupçon n’est pas loin de s’installer. Et si l’essentiel se déroulait hors de salles de réunion ?

Mais dans l’immédiat, c’est la tournure très polémique prise par les réunions du Var qui préoccupe tout le monde (lire ci-contre). « C’est le Cartel des non qui s’exprime !, tempête Claude Jullien. Et s’il ne se passe rien de similaire pour l’instant dans les autres départements, il y a un risque qu’ils soient suivis. Je crains que ce soit ces gueulards qui finissent par être écoutés ! » Un cartel qui, selon le délégué régional de la Fnaut, pourrait faire à nouveau capoter, comme cela été le cas autrefois, le prolongement du TGV Méditerranée. Entre la déception des premières réunions, le sentiment pour certaines associations de n’être pas assez écoutées, la suspicion que tout est déjà joué et l’apparition d’une opposition virulente, le débat public sur la LGV Paca semble donc pour l’instant avoir du mal à se mettre sur les bons rails. Les huit réunions thématiques, qui aborderont des problématiques précises, et les seize autres dites « de proximité » l’y remettront peut-être. A grande vitesse ?

Jean-François Poupelin

Réunion de lancement du débat public à Toulon

Le débat déraille

Le 10 février, Hubert Falco et Jacques Peyrat décidaient d’adopter, à terme, une position commune avec un seul tracé pour la future LGV Paca. Huit jours plus tard, le maire de Toulon rencontrait son homologue marseillais, en compagnie du président du Conseil général du Var Horace Lanfranchi, pour sceller un pacte d’union sur le même dossier. L’ancien secrétaire d’état aux Personnes Agées ne met donc pas tous ses ?ufs dans le même panier… Si ses collègues – pourtant en désaccord sur le futur tracé – font aujourd’hui peu de cas de ce double jeu, certains des administrés de Falco semblent beaucoup moins magnanimes. Comme l’a montré, le 8 mars dernier, la réunion de lancement du débat public qui s’est tenue au palais Neptune de Toulon.

Dans une salle quasiment pleine (746 personnes présentes selon la commission particulière de débat public, le plus fort taux de participation) et partagée entre pro et anti-LGV, Hubert Falco a en effet eu plus que du mal à exposer les raisons de son enthousiasme pour le nouveau projet de train à grande vitesse. « Au moment de démarrer la réunion, alors que la salle était à moitié pleine, raconte Claude Jullien, délégué régional de la Fnaut Paca présent ce soir-là, environ 300 personnes sont entrées brusquement avec des banderoles. » « Des habitants de Roquebrussane, de Vitauban, de Saint-Maximin et d’ailleurs », selon Frédéric Marsal de Cuverville. Sifflant et manifestant leur opposition au projet quand un intervenant était pour, « ils faisaient du bazar » mais laissaient apparemment les interpellateurs s’exprimer. « Les premiers arrivants étaient en colère, note Claude Jullien, mais la réunion se poursuivait. » Jusqu’à ce qu’Hubert Falco prenne la parole. « Là, poursuit le délégué régional de la Fnaut, le sommet a été atteint. Plus ils couvraient sa voix, plus il haussait le ton. » Au point de faire sortir le sénateur maire de Toulon de ses gonds et de couvrir sa sortie. « Je n’ai même pas entendu son « vous êtes des enc… ! » », s’amuse le militant.

Depuis cette soirée, le sénateur maire de Toulon et le président du Conseil général du Var ont informé la commission particulière de débat public qu’ils n’assisteraient plus aux réunions . Une bonne raison pour éviter le débat ?

J-F. P.

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