Pas à la fête

décembre 2005

« Livres en Liberté » fut organisée pour la première fois en novembre 1997 sur le port de commerce de Toulon, à l’initiative du Conseil général du Var. Un camouflet pour le Front national, dont la pitoyable manifestation concurrente installée le même week-end sur la place de la Liberté restait largement boudée par les acteurs culturels locaux. Le Conseil général alors présidé par Hubert Falco portait haut le flambeau des valeurs de la démocratie, au premier rang desquelles le pluralisme et la liberté d’expression. Comme d’autres associations qui en avaient fait la demande et dont l’objet approchait de façon plus ou moins évidente le monde de l’écriture, Cuverville en profita rapidement, malgré la nullité de ses moyens financiers. On nous attribua deux tréteaux et une planche. Depuis, chaque année, nous réussissions à nous incruster entre les stands officiels (…) Nous n’aurons pas de stand en 2005. La société organisatrice a changé, une bonne occasion pour en finir avec le parasitage ? Le comité de pilotage de la manifestation a décidé de « refuser toutes les demandes des associations ». Le mot « toutes » semble vouloir indiquer qu’elles étaient particulièrement nombreuses. Nous pourrions polémiquer, reprendre à notre compte les lamentations des éditeurs qui stigmatisent l’orientation trop commerciale de la fête (…) nous pourrions demander ainsi ce que peuvent bien venir foutre sous un chapiteau au fronton duquel est écrit « le Var fête la littérature » Patrice Carmouze, Jean Roucas ou Yvette Horner. Bref, nous pourrions cracher dans une soupe dont nous nous sommes jusque là largement repus, ce qui ne serait pas très urbain. (…) Fallait-il attendre deux mois, compter x coups de fil et autant de fax envoyés à la société organisatrice et au Conseil général pour enfin connaître mardi 15 novembre, soit trois jours avant le début des festivités, la décision négative du comité de pilotage ? Pourquoi les personnes mandatées pour gérer les fonds publics agissent-elles comme si elles étaient propriétaires de ces fonds, avec toute la morgue et la suffisance que cela implique parfois ? Mention spéciale au laquais délégué par le CG, la société MPO, qui après un premier contact plutôt encourageant (…), s’est montrée particulièrement zélée en matière de mépris (les « références » de Cuverville doivent choquer le client, c’est sûr). En 1997, quand le FN gérait la ville, le CG avait pour obligation morale de défendre la diversité culturelle. La liberté d’expression était à la mode, et figurait en bonne place sur le programme politique des candidats appelant le renouveau. On dirait que les temps changent.

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