Chacun sa croix

septembre 2004

Il est de bon ton aujourd’hui de reporter la principale responsabilité de la pollution atmosphérique sur les voitures, car les industriels ont fait de gros efforts sur la réduction du dioxyde de souffre, et la réduction des émissions passe pour être plus facile sur les sources fixes. Mais les chiffres montrent que cette responsabilité est encore très bien partagée entre trois acteurs majeurs : l’industrie et l’énergie, les transporteurs, et les automobilistes.

Concernant l’industrie, concentrée autour de l’étang de Berre, un expert dénonce l’idée selon laquelle la situation est contrôlée : « on ne maîtrise pas du tout. Si aujourd’hui les mesures sont enfin automatisées, et donc impossibles à truquer, il y a eu de grosses pressions jusque récemment. Sur Berre, on peut très bien rater un panache de fumées, qui passe entre les stations de mesure. Et les industriels encouragent les réseaux de mesure à communiquer sur leurs efforts. Mais ils rechignent à faire évoluer leurs procédés. Ils commencent à être embêtés sur les composés organiques volatils, mais leur but c’est d’aller le plus lentement possible, parce qu’au bout de l’étude, ils savent qu’il y aura un coût. » Ainsi, en dehors du SO2, qu’elles produisent presque intégralement, l’industrie et la production d’énergie sont responsables de 65 à 75 % de la plupart des polluants dans les Bouches du Rhône*. Pour le dioxyde d’azote, le transport routier concurrence l’industrie pour produire environ 45 % de la pollution. Et parmi les modes de transport, les poids lourds font exactement jeu égal avec les voitures individuelles, contribuant chacun à 43 % de la pollution, le reste étant produit par les véhicules utilitaires légers (camionnettes). C’est peut être l’un des domaines où les efforts seraient les plus spectaculaires : dans une région où le trafic de transit et de longue et moyenne distance est important, le ferroutage (mettre les camions sur les trains) offrirait une solution rapidement efficace.

Pollution automobile : ça remonte

Les indicateurs les plus révélateurs de la pollution automobile sont les oxydes d’azote (NO et NO2). L’historique de cette pollution est très instructif, car les taux ont baissé assez régulièrement depuis la fin des années 1980. En effet, les innovations technologiques des constructeurs automobiles ont été considérables, comme le filtre à particules sur les diesels, par exemple. Si cette baisse se prolonge sous l’effet du renouvellement du parc automobile, elle est aujourd’hui compensée par l’augmentation plus rapide du trafic et du nombre de véhicules. Depuis 2000, les taux de NO2 remontent sur le secteur Aix-Marseille notamment. Cette fois, les avancées technologiques n’y suffiront pas, puisqu’elles s’avèrent de plus en plus coûteuses et les bénéfices moindres, tandis que l’augmentation du trafic s’accélère avec l’ouverture de nouvelles infrastructures routières. Ce retournement de la courbe de pollution était prévisible, mais les élus ne l’avaient peut être pas anticipé si rapide. Les Plans de déplacements urbains votés dans les grandes villes de la région ne semblent pas de taille à enrayer le phénomène : centrés sur la fluidité des déplacements, ils prévoient d’abord de nouvelles routes…

E.B.

* Source Airmaraix.

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