A la recherche du poil perdu…

juillet 2008
Enfin une enquête dans le Ravi qui n'est pas rasoir ! S'épiler ou ne pas s'épiler : là est la question...

Aisselles en friches, jambes velues, poitrine de gorille… A l’approche de l’été, la guerre du poil est déclarée. Il ne suffit plus d’être beau là où ça se voit. La tendance consiste à vouloir être parfait jusque dans les parties les plus intimes de notre anatomie. L’homme (et la femme) a beau descendre du singe, l’évolution s’est chargée de clairsemer sa toison, dont le rôle calorifique devenait obsolète. Mais la vision arborée du mont de Vénus de Gustave Courbet, en 1866, n’est définitivement plus d’actualité. Alors qu’un pubis poilu nous différencie des animaux, dépourvus de pilosité à cet endroit, la tendance est clairement à la domestication de la toison, voire à l’éradication définitive du plus fin des duvets.

Les femmes investissent en beauté. Petits salons, Spa de ville, centres d’épilation envahissent la région Paca. Les clientes en redemandent et les hommes s’y mettent. Les professionnels du secteur draguent à coup de sémantique prometteuse et branchée. A Istres (13), Lumepil promet un espace de « réjuvénation » (sic) ! » Les salons rivalisent d’inventivité. Il y en a pour toutes les bourses. Body Minute par exemple, créé par le fils du coiffeur Jean Louis David, assure apporter « aux femmes soucieuses de leur beauté, une réponse… démocratique ! ». Avec un abonnement mensuel à 9.90 euros, il a déjà ouvert 180 instituts en France, dont sept en Paca. Les moyens de se débarrasser des poils récalcitrants ne manquent pas : épilation électrique, cire chauffée, crème dépilatoire, lumière pulsée, laser… Les tendances varient comme les modes vestimentaires. Si le « ticket de métro » (parisien, le format du ticket marseillais est trop imposant !) reste une valeur sûre, le triangle minuscule est très en vogue. « Les femmes veulent des « maillots » de plus en plus petits. La mode des strings échancrés en est responsable », observe Laurie Karmon, employée chez Clinic Epil, à Nice, et spécialiste de l’épilation au laser. Dans ce combat entre nature et culture, laisser les aisselles foisonnantes sans heurter les regards devient impossible. Le diktat de la « dune désertique » semble avoir définitivement pris le dessus. « L’épilation intégrale qui vient des pays chauds était confidentielle il y a encore 15 ans. Elle est devenue courante. Les jeunes femmes nous la demande systématiquement », assure Michelle, praticienne chez Médilaser à Marseille. Et les motivations sont diverses. « Certaines femmes le font pour l’hygiène ou pour le côté pratique. De nos jour, si vous n’êtes pas impeccablement épilée, vous passez pour négligée », explique Christine Imbert, qui dirige Starlet’s-le-Matou, un centre d’épilation à Marseille.

L’arrachage du poil en geste purificateur ? Cette vénération du sexe glabre a aussi ses détracteurs. Le sexologue Gérard Leleu voit dans cette tendance une « chosification » de la femme. « L’épilation totale est une mode à fuir absolument, explique-t-il. Les femmes refusent ce qu’elles sont. On leur demande de ressembler à des fillettes pré-pubères. » L’épilation, stade suprême de la régression ? « 1 heure 20 !, répond en écho, Laurie Karmon. C’est la durée moyenne qu’une femme consacre chaque mois à son épilation. Alors on peut comprendre que les plus jeunes aient envie de tout enlever. » Et les hommes qu’en pensent-ils ? Le mâle moderne semble également pris d’une obsession : le débroussaillage.

Réservée à l’origine aux sportifs et aux homosexuels, l’épilation masculine s’est largement généralisée. « On reçoit beaucoup d’hommes hétérosexuels pour les épilations. Ils ont entre 20 et 40 ans. La première fois, c’est une demande de leur compagne. Ils y prennent goût et reviennent spontanément », observe Michel Alain Girard, directeur d’un centre de beauté marseillais réservé aux hommes. Le look « gladiateur » a détrôné le style play-boy méditerranéen des années 70, un peu sauvage non domestiqué. On l’appellera Pierre, la trentaine citadine branchée. Il fréquente régulièrement un institut de beauté. « Je me fais épiler le torse parce que ça fait viril, affirme-t-il. Ça plaît à ma copine ! Avant je taillais mes poils pubiens, maintenant j’utilise la cire dépilatoire et ça plaît tout autant à mon amie. » Une manière comme une autre de se mettre à poil…

Rafi Hamal

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