Vitrolles : Conseil municipal du 15 octobre 2009

novembre 2009
Tous les mois, un grand reporter du Ravi « teste » incognito un conseil municipal dans une ville ou un village de notre belle région...

 

« Je n’oublie pas et n’oublierai pas d’où je viens »

18h17 Attroupement dans le hall de l’hôtel de ville, salle du conseil archicomble, employés municipaux agglutinés aux portes, etc. L’élection du successeur de Guy Obino, maire depuis 2002, décédé le 4 octobre, attire les foules en mairie (1). Peut-être moins pour l’héritier que pour les circonstances de sa nomination… Explication. La mort du bouteur des Mégret hors Vitrolles a été l’occasion d’une bouillabaisse politique dont la région a le secret : pour éviter une guerre de succession, le soir de l’enterrement de Guy Obino, Jean-Noël Guérini, président PS du Conseil général des Bouches-du-Rhône, a réuni la majorité municipale. A minuit, conférence de presse sur le perron de l’hôtel de ville : arguant d’un « testament politique », l’homme fort des socialistes du département annonce le nom de l’heureux élu, Loïc Gachon (premier adjoint depuis juin), celui de son numéro 2, Jean-Claude Mondoloni, et s’invite pour le conseil municipal du jour. Décisions entérinées à la section PS quelques jours plus tard. Certains ont trouvé la méthode quelque peu cavalière…

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18h24 Décryptage d’un ancien conseiller municipal : « Au printemps, malgré l’opposition de sa majorité, Guy Obino a imposé son élu à l’Urbanisme premier adjoint en remplacement de Jean-Claude Denjean, avec qui il était en désaccord. Dans la plus pure tradition républicaine, Guérini a joué la continuité. » Et de préciser, amusé : « Il a aussi menacé de couper les financements du Département à la ville. » Dans la pure tradition locale…

18h30 Pour accueillir tous les curieux, un écran géant est installé dans le hall. Adossé à son fauteuil, Michel Piquet, conseiller de la majorité (union de la gauche) tendance jovial, rigole de l’affluence : « On aurait dû faire payer l’entrée ! »

18h32 Caricature du gendre idéal – 35 ans, beau gosse et costard-cravate (marron) parfait -, Loïc Gachon ouvre la séance sans surprise, avec une pensée pour son parrain politique : « Je vous demande un moment de silence en mémoire de Guy Obino. » Plus surprenant, l’encore premier adjoint place une petite pique à l’occasion de la désignation de Lalia Attaf comme secrétaire de séance : « Il y a un autre candidat ? » Quelques gloussements féminins l’accompagnent.

18h41 Pas plus de concurrence pour le poste de maire, mais six demandes d’intervention. Jean-Claude Denjean ouvre le bal. Cheveux et costume gris, la soixantaine svelte, l’ancien premier adjoint joue l’apaisement : « A trois reprises, j’ai été maire par intérim, j’aurais donc été un candidat légitime. Mais une autre décision a été prise, j’en prends acte. » Avant de trébucher dans une conclusion très patriarcale : « La fonction demande de l’humilité, de l’écoute, de la disponibilité », etc. Loïc Gachon se tortille sur le fauteuil de son prédécesseur un doigt sur les lèvres. Genre hyper attentif.

18h44 Emmitouflée dans une étoffe noire, Rolande Guedj (opposition DVD, groupe Vista) enchaîne, des trémolos dans la voix : « Je suis triste et orpheline, et maintenant on veut me prendre ma ville ! Chaque fois que vous voterez oui, vous direz oui à Jean-Noël Guérini ! » Visage fermé, l’élue conclut théâtrale : « Je pose mon écharpe en signe de deuil et de la démocratie bafouée. Je quitte la salle pour le vote du maire. Je vous souhaite bon appétit ! » Sortie réussie : applaudissements d’un côté, huées de l’autre.

18h48 Au tour de Christian Borelli. Droit dans ses bottes et son costard bleu UMP, le chef de file de la droite locale (Majorité présidentielle, Nouveau centre, ex-FN) tonne, grandiloquent : « Alors qu’il y a eu la révolution de 1789, à Vitrolles la royauté n’a pas disparu ! », « Parler d’un testament politique, c’est digne d’une république bananière ! » En pleine affaire de la nomination du fils Sarkozy à la tête de l’Etablissement public d’aménagement de La Défense, l’attaque est osée… La conclusion est à l’unisson : « Nous ne prendrons pas part au vote. Je laisse mon siège à Jean-Noël Guérini ! » Flop total. L’élu se répète en sortant, sans plus de succès.

18h56 Dans la foulée, un Claude Michel (majorité) bien inspiré – « ça n’était pas un testament politique, mais une proposition », etc. – le gendre idéal lève enfin « un suspense insoutenable » : « Je suis candidat. » Puis assure, sans rire : « Cette assemblée est libre et souveraine et chacun votera en son âme et conscience dans le secret de l’isoloir. Toute candidature est légitime et je la dépose en toute humilité. »

19h00 Début du vote. Des discussions à deux ou trois s’engagent, quelques rires fusent. Un brouhaha feutré s’installe. Mains dans les poches de son pantalon, Loïc Gachon arpente la salle du conseil, au gré des rencontres. Jean-Noël Guérini se fait attendre.

19h10 Jean-Claude Denjean tend le texte de son intervention au journaliste de La Provence, en suppliant presque : « Il n’est pas long, j’aimerais qu’il passe en intégralité. » Réponse du confrère : « Je ne m’engage pas. »

19h16 Le conseil vire à la kermesse. Claire Bay, doyenne du conseil et présidente le temps du vote, appelle les élus d’opposition. D’une seule voix, majorité et public chantent à chaque nom : « Absent ! »

19h21 Simon Nezri, élu de la majorité, annonce le résultat du vote : « 32 Gachon, un blanc. » Ovation. Elus et public se lèvent. La doyenne du conseil remet l’écharpe tricolore à Loïc Gachon, qui reprend immédiatement « les rênes. »

19h22 Dans la foulée, séquence émotion. Le nouveau salue son élection par un court discours digne de l’Ecole des fans du regretté Jacques Martin : hommage à son mentor Guy Obino, annonce de la poursuite de son programme et remerciements à ses parents et à sa femme, présente au premier rang du public. Son « Je n’oublie pas et n’oublierai pas d’où je viens » final porte cependant à confusion…

19h26 Une consœur s’amuse : « Guérini n’est pas là, mais l’effet d’annonce a fonctionné ! »

19h29 Délibération 3, « Election des adjoints au maire. » Désignation de Jean-Claude Mondoloni comme numéro 2 et lot de consolation pour Jean-Claude Denjean. Après sa déchéance printanière, l’ancien bras droit de Guy Obino retrouve un poste d’adjoint.

19h32 Comme s’ils avaient attendu la confirmation des décisions du président du Conseil général, les premiers Vitrollais quittent le conseil.

19h47 Délibération 6, « Désignation des délégués de la commune à la Communauté d’Agglomération du Pays d’Aix. » Petit moment de flottement : malgré une première élection en 2002, le nouveau maire montre encore des lacunes de débutant. « Les bulletins comportent un petite erreur, je ne sais pas comment faire », s’excuse Loïc Gachon. Son Directeur général des services et son adjoint se précipitent. Conclusion : « Suspension de séance pendant quelques minutes. »

19h55 Le maire en profite pour rejoindre sa femme, une agréable blonde au style décontracté. Enlacement, embrassades émues, avant que le gendre idéal ne pose ostensiblement la main sur les fesses de son épouse.

20h00 Rolande Guedj puis sa colistière Marie-Odile Petrissans déposent à leur tour leurs interventions sur le bureau du confrère de La Provence.

20h04 Loïc Gachon lève la séance, sobrement, dans la droite ligne de son premier conseil : « Je vous remercie, y compris pour la tenue de la séance. » Jean-Noël Guérini y avait veillé…

Jean-François Poupelin

(1) Une cantonale partielle est prévue fin novembre pour désigner son successeur au Conseil général.

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