Le bonheur est dans l’accueil

juin 2009
Au rythme des saisons, des paysans vous invitent au bonheur d’être « nature ». C’est le credo d’Accueil paysan, pour le plus grand plaisir des citadins chlorophylles de Provence-Alpes-Côte d’Azur…

« Un jour, on faisait griller un agneau au barbecue. « Il est gros ce poulet ! », s’est étonné un gamin dont la famille passait un séjour chez nous. » Des histoires comme ça, Françoise Fleutot en a plein la mémoire deux ans seulement après avoir ouvert, avec son mari, un gîte à Montlaux (04), à 650 mètres d’altitude, au pied de la montagne de Lure. Première motivation des citadins de passage le temps d’un week-end ou d’une semaine ? « Que leurs enfants voient des animaux en vrai ! » Et pas seulement sur une broche. Dans la ferme d’Aco Astié, les visiteurs sont invités à assister à la traite, à regarder la fabrication du fromage mais aussi à suivre le troupeau de chèvres sur son itinéraire. « Ceux qui viennent sont à la recherche d’authentique, explique-t-elle. Les gens nous disent parfois : « Vous avez la belle vie ! ». Certes ! Mais on bosse toute l’année. »

Le gîte de Françoise Fleutot est membre du réseau Accueil paysan, qui regroupe une trentaine d’adhérents en Paca. Son slogan : « La campagne à bras ouverts ! » Son credo : « Le paysan accueille dans ses champs parmi ses animaux dans le paysage que son travail façonne. Il vous invite au bonheur d’être nature. » Chargée de la communication au siège national grenoblois, Agathe Ancé ne cache pas sa satisfaction : « Notre offre est dans l’air du temps, celui d’un besoin de retour aux sources. Accueil paysan est né dans les réseaux d’éducation populaire. Notre objectif n’est pas d’offrir le gîte le plus confortable mais de favoriser l’échange. L’idée est aussi de maintenir les ruraux sur place en leur offrant un complément économique. »

« Les citadins veulent participer avec nous »

Henri Giroux est ce que l’on nomme un « néo-rural ». En 1975, il a plaqué son usine lyonnaise où il était mécanicien pour faire paysan dans les Hautes-Alpes. Depuis trois mois, il est à la retraite : 500 euros par mois. « C’est peu, mes anciens amis ouvriers ont de plus grosses retraites mais ils n’ont pas eu la belle vie. Vous pouvez me donner 50 000 euros par an, pas question que je retourne en ville ! » En une trentaine d’années, il a été agriculteur, éleveur avec 400 brebis, producteur de fromage de chèvre. Il a aussi fondé une ferme auberge. « On en a eu ras le bol. Les gens voulaient être servis comme à Paris ! » Désormais, il se recentre sur une chambre d’hôte et un « camping d’accueil paysan ». Le comportement des citadins l’amuse parfois. « Certains Marseillais arrivent le soir en chambre d’hôte. Le matin, ils se sont fait propres, parfumés. Puis ils vont au supermarché à Serres (05), la ville la plus proche (3 000 habitants). Et pour finir, ils font de la voiture toute la journée ! » Au camping, les « accueillis » sont beaucoup plus réceptifs à la campagne, cherchent la rencontre…

« Il faut prendre du temps pour expliquer qui nous sommes, ce que nous faisons », souligne Christiane Estienne, dont le gîte est situé à Saint Andiol (13) sur une exploitation agricole biologique affiliée à une Amap (Association de maintien de l’agriculture paysanne). « Les citadins veulent participer avec nous, souligne-t-elle. Ils désirent connaître la campagne, notre vie, comment on travaille. » Cerise sur le gâteau : fruits et légumes gratuits pendant le séjour. A ce régime, certains clients deviennent des amis. « Un Belge revient régulièrement et fait avec nous l’agriculteur, les travaux des champs, le peintre… » A Bauduen (83), non loin des gorges du Verdon, Nelly Chaffard – élevage caprin, fromage de chèvre – résume la motivation des citadins qui fréquentent son gîte : « Ils ont envie d’avoir des contacts avec ceux qui travaillent la terre. » Avant d’intégrer le réseau Accueil paysan, elle était membre de celui des Gîtes de France : « Là ce n’était pas le même esprit. Les visiteurs se comportaient en clients dans une logique de chacun pour soi. » Chassez le naturel…

Michel Gairaud

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