"Ce sont les industriels qui posent probléme"

avril 2020 | PAR Jean-François Poupelin
Ancien directeur médical de l’hôpital de Martigues et militant LFI, Philippe Courtin a été élu sur la liste de Gaby Charroux, maire PCF de Martigues depuis 2009. Il plaide pour une transition industrielle.

Quel diagnostic économique et écologique peut-on porter sur le territoire ?

La problématique du territoire, c’est de trouver un discours qui lie les enjeux écologiques et la préservation des emplois. Il y a deux niveaux de réponse, à moyen et court termes. A moyen terme, la transition industrielle est nécessaire car l’urgence climatique est de plus en plus importante. En plus, toutes les études montrent qu’elle peut être source de milliers d’emplois. Il faut donc y penser aujourd’hui. Malheureusement, pour l’instant il n’y pas de volonté politique de travailler sur la transition énergétique : il y a toujours des subventions à l’industrie et peu d’aides pour les énergies renouvelables. A court terme, il faut trouver des solutions pour lutter contre les pollutions tout en préservant les emplois. Donc travailler sur des technologies moins polluantes.

Comment faire bouger les choses ?

Comme ça ne viendra pas pour l’instant des politiques et des industriels, il faut un rassemblement des salariés, des syndicats, des citoyens, des élus locaux pour avoir des moyens de pression. Dans cette optique, des initiatives ont été lancées. Les consultations sur les maladies environnementales et professionnelles à l’hôpital de Martigues, avec le soutien de l’ARS (Agence régionale de la santé) ou la mise en place d’un comité de surveillance de l’activité industrielle du golfe de Fos et de son impact environnemental par la CGT d’Arcelor Mital. Dans chaque industrie de l’étang, un référent informe sur les postes et produits à risque et cartographie les risques.

Cette dernière initiative marque une évolution de la CGT. Désormais, elle s’intéresse autant à l’impact de l’activité sur les salariés qu’aux industries alternatives et aux initiatives qui préservent l’environnement. Et elle affiche également sa volonté de travailler avec les associations et les élus locaux.

Pourquoi y a-t-il si peu de volonté politique ?

Il y a un infléchissement de la mairie de Martigues. Gabby Charroux s’est récemment exprimé sur la nécessité de travailler sur les [alternatives] alors que jusqu’à présent, et de façon compréhensible, la mairie ne voulait pas trop parler de pollution industrielle au nom de la préservation des emplois. De plus, en tant que mairie communiste, Martigues ne pourra pas faire autrement que de soutenir l’initiative de la CGT.

Mais je n’en veux pas aux élus locaux. Ce sont les industriels qui posent problème : leurs objectifs sont de produire et de satisfaire leurs actionnaires. Ils font du chantage à l’emploi, et minimisent beaucoup de substances toxiques alors que les cancers et le diabète explosent, par exemple à Port-de-Bouc par rapport au niveau de Paca. Et s’ils participent un peu au développement des technologies moins polluantes, ils travaillent avec des substances toxiques dont on ne connaît pas encore les effets.

Propos recueillis par Jean-François Poupelin