Bienvenue chez les Ch’tis

juin 2008
Au Nord, c’était le débat. le Ravi a été invité, en mai, à participer aux deuxièmes assises internationales du journalisme à Lille, petit poucet parmi les grands médias. Nul n’est prophète en son pays. Cinq ans après la création du mensuel régional satirique, La Provence, Var Matin, Nice Matin, tous propriété du groupe Hersant, n’ont toujours pas daigné écrire trois lignes pour mentionner notre existence. Afin qu’un débat, rugueux, puisse avoir lieu avec les patrons de la presse régionale, il a donc fallu s’exiler chez les Ch’tis. Une table ronde nous a notamment opposés au directeur de la Voix du Nord, au président du Conseil de surveillance de la Nouvelle République du Centre-Ouest, à la directrice de France 3 Nord Pas-de-Calais, au directeur national des rédactions de France Bleu… Que du beau monde ! Thème de la passe d’arme : « quel pluralisme à l’heure des monopoles régionaux ? » Réponse : pas grand-chose…

Des géants aux pieds d’argile. La presse quotidienne régionale (PQR) étend son emprise en investissant dans les journaux gratuits et les télévisions locales… Au nom de l’efficacité économique, les grands titres de la PQR s’efforcent soigneusement de contrôler la concurrence sur leur territoire. Objectif de la man?uvre : ne pas lâcher la moindre parcelle du marché de la publicité. Mais les mastodontes de la presse régionale sont des forteresses assiégées. S’ils gênèrent toujours de confortables bénéfices, ils perdent sans cesse des lecteurs. Ceux qui restent vieillissent. Pour séduire les annonceurs, le plus souvent institutionnels, la PQR arrondit les angles, renonce à toute forme d’investigation, d’innovation, privilégie les sports, les faits divers, la communication, au détriment d’une information susceptible d’incommoder les notables du monde économique ou politique.

Une charte au maroilles. Les assises ont permis de poser quelques questions de fond. A quoi sert un localier qui n’a plus d’autres confrères sur sa contrée ? A quoi sert un journaliste qui a perdu la confiance du public ? Car « le journalisme est un métier paumé », selon l’expression de Jérôme Bouvier, ancien directeur de Radio France internationale à l’initiative des rencontres de Lille. Les causes du malaise sont multiples : les contingences économiques, la révolution numérique, les pressions politiques, la paresse intellectuelle, celle des journalistes mais aussi celle des lecteurs, auditeurs et téléspectateurs, zappeurs et consommateurs… Résultat des courses dans la capitale du Nord ? La rédaction d’une « charte qualité de l’information ». Cela ne mange pas de pain, fut-il tartiné de maroilles… Quelques jours plus tôt, à Paris, les deuxièmes « états généraux pour le pluralisme » ont à nouveau plaidé pour des médias soustraits à l’emprise des pouvoirs économique et politique en proclamant « l’urgence de construire un pôle public et associatif des médias sans but lucratif ». Allez biloute, ne mégotons pas ! On signe les deux textes…

le Ravi

Infos & satire seront au rendez-vous du prochain numéro du Ravi chez les marchands de journaux dès le vendredi 4 juillet. Ou, pour passer de la théorie à la pratique en soutenant les p’tits soldats de la presse indépendante régionale, dans votre boîte aux lettres après avoir rempli et posté le bulletin ci-dessous.

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