Bollène : conseil municipal du 13 décembre 2010

août 2011
Tous les mois, un grand reporter du Ravi (excellent mensuel en vente par abonnement et dans les bons kiosques en Paca) « teste » incognito un conseil municipal dans une ville ou un village de notre belle région...

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17h42 A l’entrée de la ville, déserte, un panneau prévient : « Pour votre sécurité la ville est placée sous vidéoprotection. » Visiblement, ça n’est pas à cause de la présence à quelques encablures du site nucléaire du Tricastin…

17h55 Mèche blonde, pull gris, écharpe rose et chewing-gum en bouche, l’ex-FN et ex-MPF Marie-Claude Bompard, maire depuis 2008 et conseillère générale, s’impatiente.

17h58 L’épouse de l’inamovible maire d’Orange ouvre la séance d’une voix doucereuse légèrement aiguë. André-Yves Beck, adjoint aux Finances et à la communication, directeur de la com de Jacques Bompard et fondateur du groupuscule d’extrême droite Unité radicale, se frotte les mains.

18h05 Pull à col roulé, coupe militaire, l’homme de confiance du maire d’Orange se lance dans la présentation du budget principal 2011 (délibération 4). Point important à ses (petits) yeux (méchants) : « La baisse des charges de personnel et à caractère général. » Les présents peuvent s’en rendre compte : la température de la salle du conseil est presque aussi polaire que celle de l’extérieur. Elus et spectateurs ont en majorité gardé leur manteau.

18h07 André-Yves Beck s’en prend à David Alessi, unique élu d’opposition UMP, qui a dénoncé en conférence de presse une baisse de l’autofinancement de la commune et des subventions aux associations. « Si nous n’étions pas dans le champ politique, cette malhonnêteté relèverait du pénal », conclut tout en mesure l’adjoint.

18h08 L’intéressé, un trentenaire brun en costard, ne se démonte pas : « Quand un élu cumule finances et communication, il y a mélange des genres. » Et encore : « Vous me reprochez de m’emmêler dans les documents, mais je fais mes commentaires avec ceux que vous nous donnez. » La suite de l’intervention du jeune conseiller d’opposition est beaucoup plus confuse.

18h17 Une grande blonde aux jambes interminables fait son entrée sous le regard intéressé de la première rangée du public.

18h26 Depuis plusieurs minutes, David Alessi et Mme le maire s’étripent. Registre classique de l’extrême droite, de sa voix onctueuse, Marie-Claude Bompard joue les victimes : « C’est scandaleux de dire que les fonctionnaires de la commune sont nos fonctionnaires. Là plus qu’ailleurs, il y a un contrôle sur toutes les délibérations. » David Alessi, un peu tête brûlée : « Heureusement vu vos compétences. » Fureur de la conseillère générale.

18h39 Débat budgétaire toujours. Michel Lebailly, adjoint dans l’équipe PS-PCF battue en 2008, se lance. Marie-Claude Bompard et André-Yves Beck complotent en souriant.

18h44 L’adjoint à la communication prend la parole, mielleux : « Quand vous avez dit que votre groupe votera contre, ma voisine de gauche m’a dit « tant mieux ». »

19h03 Marc Serein, maire sortant, demande la parole. Le débat ne gagne ni en clarté ni en hauteur. Monique Discours-Mombelli (PS), Michel Lebailly (encore), André-Yves Beck (toujours) et Paul Eymard (adjoint à l’Urbanisme) y apportent un peu plus de confusion. Marie-Claude Bompard se contente de quelques exclamations et de renvoyer son opposition de gauche au bilan de « 30 ans » de gestion socialiste.

19h22 Malgré l’ambiance, la salle ne se réchauffe pas. La grande blonde part, toujours aussi royale. Suivie de plusieurs retraités.

19h26 « Sorties de l’inventaire du parc informatique » (délibération 9). « Quatre iront à la gendarmerie, annonce fièrement l’homme de confiance de Jacques Bompard. Comme l’Etat n’assume plus sa charge de lutte contre la délinquance, les communes doivent prendre le relais. Ca montre l’état de délabrement de notre pays. » Bougonnement de Maxime Villota, un grand brun à lunettes du PCF : « Faire cette envolée pour quatre ordis… »

19h35 « Subvention aux associations » (délibération 10). Sourire aux lèvres et cheveux ras, Claude Raoux, adjoint à la Vie associative, s’amuse : « Vous allez évidemment me dire que le social est encore pénalisé (1). Je voudrais faire une information : Pedibus, Vaucluse Information Femme, etc., c’est la grande nébuleuse. Ces associations tournent dans le département et au niveau régional avec des millions d’euros. » Et de triompher : « Je demande à qui profite le crime ? » Les femmes battues, les mères isolées et tous les bénéficiaires de ces structures apprécieront… L’opposition approuve presque sans sourciller. Parce que les associations caritatives (Secours pop, etc.) ont vu leurs subventions augmenter ?

19h50 Un petit échange entre Marie-Claude Bompard et André Vigli, opposition PS-PCF, à propos du retour en régie municipale de l’office du tourisme – une « volonté de mainmise sur tout le tissu social » pour l’opposition -, se conclut par un blanc du maire. A court d’argument, elle dégaine un sourire forcé et ricane : « Ha, ha, ha, ha, ha, ha ! » Avant de se reprendre. (2)

19h57 David Alessi, qui a refermé son blouson, envoie des SMS.

20h03 Alors que la création de deux postes de policiers municipaux est votée à l’unanimité, les esprits s’échauffent dans le public. Un chargé de communication de la commune, trentenaire bon teint mais un peu nerveux, se lève et agresse un jeune type : « Ca ne vous plaît pas ? » Réponse : « Non. » Puis s’en prend à une petite brune : « Vous avez tort, y’en a pas assez ! » Réponse cinglante : « Je ne vous permets pas ! Il vaut mieux mettre du personnel dans les écoles que dans la police. » Les Bollénois sont visiblement moins frileux que leur opposition. Qui semble attendre 2014…

20h05 Marie-Claude Bompard annonce le lancement d’un audit sur la Semib, une société d’économie mixte municipale chargée de gérer le parc HLM de la ville, pour « éclaircir une situation qui demande des éclaircissements » (sic). Mais refuse de préciser les problèmes, un bras dans le vague : « Je ne peux pas, c’est comme ça. » Georges Pelletier, ancien président de la Sem élu en 2008 avec l’ex-FN et aujourd’hui dans l’opposition, s’étonne : « Nous avions fait un audit après notre élection et il n’y avait pas de problème… » Réponse définitive du maire : « C’est clair, le cabinet n’a pas fait son travail ! » De débarrasser la commune de cette compétence ?

20h15 Remarque de Michel Lebailly à propos du renouvellement de la convention entre la ville et Cinébol, l’association qui gère le cinéma local (délibération 17) : « Pourquoi la convention d’objectif est d’un an et la convention de mise à disposition de trois ? » Re-sourire et re-rires forcés de Marie-Claude Bompard. André-Yves Beck vole à son secours, triomphal : « Contrairement à ce que vous racontiez pendant la campagne électorale, nous renouvelons la convention ! » Parce que Le Clap « s’autofinance largement », comme le note la délibération ?

20h21 C’est au tour des jardins collectifs de la ville d’être réorganisés.

20h26 Commentaire de notre petite brune après une vacherie lancée par l’épouse à Marc Serein : « Elle est folle ? »

20h28 Le conseil touche à sa fin : Maxime Villota consulte son portable, André-Yves Beck se mange les ongles, Marie-Claude Bompard enfile son manteau. Puis l’ôte.

20h43 Georges Pelletier s’étonne de la vente à la découpe du patrimoine communal (délibération 23). Réponse lyrique de l’épouse : « Rêvons à notre mesure ! »

20h45 Marie-Claude Bompard clôt le conseil. Curieusement, la mise en examen le jour même de son mari pour « prise illégale d’intérêts » dans l’achat de deux parcelles à Orange n’a suscité aucun commentaire…

Par Jean-François Poupelin

(1) Dès son élection, Marie-Claude Bompard a coupé les subventions au centre social de la ville. (2) La décision adoptée à 19h50 est cassée par le tribunal administratif en septembre 2011.

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