Symbole contre symbole

décembre 2006
Le Père Noël est une ordure ! C’est probablement ce que se dira à la fin du mois Fahd Zedal, élève de CE1 à l’école Oddo à Marseille. Le samedi 25 novembre, un mois jour pour jour avant qu’il n’ouvre ses cadeaux, Christian Frémont, préfet de région et des Bouches-du-Rhône, a ordonné l’expulsion de son père vers l’Algérie. Qui laisse également derrière lui, sa femme, sa mère et ses s?urs. Certainement une pure coïncidence, M. Zedal devait passer le jour-même, après 17 jours de détention, devant le juge des libertés du Tribunal de grande instance de Marseille, désormais installé pour ce genre d’affaire dans le flambant neuf centre de rétention du Canet. La préfecture a opportunément utilisé une compagnie algérienne de transport maritime pour permettre à la police de l’air et des frontières d’exécuter son sale travail.

Résistance citoyenne. La France sous-traite désormais ses expulsions à des compagnies étrangères. Certainement plus pour éviter les résistances que par souci d’économie. Il y a quelques semaines, les marins CGT de la SNCM avaient fait grève pour protester contre l’embarquement sur leur navire de deux sans-papiers. Dans les Bouches-du-Rhône, le Réseau éducation sans frontières (RESF) avait jusqu’alors réussi à empêcher toute expulsion du millier de parents sans papiers déboutés dans le cadre de la circulaire Sarkozy de juin dernier. La décision de Christian Frémont est d’autant plus symbolique que, le même jour, RESF organisait un parrainage républicain pour placer une centaine d’enfants, de collégiens, de lycéens et d’étudiants marseillais, ainsi que leur famille, sous la protection de 80 citoyennes et citoyens français. Mais le préfet est un dangereux récidiviste en la matière : le 24 juin dernier, jour de la première cérémonie de parrainages de Réseau éducation sans frontières, il avait déjà renvoyé Fathi, un étudiant tunisien, dans son pays.

Hypocrisie politique. Des symboles forts, comme les aime son patron, futur candidat de la l’UMP à la présidence de la République. En campagne depuis quatre ans, en plus de l’immigration choisie, ce dernier prône, aux côtés de Ségolène Royal, candidate socialiste, le « co-développement » comme solution aux problèmes migratoire de la France. Une généreuse idée selon laquelle en aidant la croissance économique des pays de départ des migrants, leurs populations n’auront plus de raisons de vouloir venir nous « envahir ». Mais le cas de monsieur Zedal relève d’une simple régularisation. Et la France n’a jamais consacré les 0,7 % de son PIB promis depuis des décennies dans les instances nationales à l’aide aux pays en voie de développement. Encore un symbole.

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