« François Fillon se brûle les ailes »

novembre 2012 | PAR Michel Gairaud, Rafi Hamal
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Entretien en partenariat avec Radio Grenouille
Martine Vassal (UMP), adjointe au maire et présidente de commission à la communauté urbaine Marseille Provence Métropole, invitée de la Grande Tchatche

Secrétaire nationale de l’UMP, comment qualifiez-vous la tempête que traverse votre parti ?
Ce n’est pas glorieux. Vivement qu’on passe à la reconstruction et à la reconquête…

Vous avez voté Copé, comme 62,5 % des militants des Bouches-du-Rhône. Des amis de François Fillon disent qu’il y a eu des procurations anormales dans le « 13 »…
Les Bouches-du-Rhône sont, comme d’habitude, pointées du doigt… En réalité, tout s’est bien passé. Il y avait quand même un huissier dans chacun des bureaux ainsi que deux coprésidences, l’une proche de Copé et l’autre de Fillon…

Quand François Fillon parle de mafia à l’UMP, c’est grave non ?
François Fillon se brûle les ailes. Ce n’est pas digne de lui de parler de mafia. Où était la mafia lors de l’élection du 18 novembre ? Peut-être en Corse…

Gérard Longuet a dit : « Rien d’étonnant, c’est la première fois que l’UMP découvre grandeur nature la démocratie. »
C’est vrai.

N’est-ce pas un aveu affligeant pour la droite ?
Les socialistes ont découvert la démocratie au bout de trente ans. Nous, il nous a seulement fallu dix ans…

Un résultat a été moins commenté. Le vote autour des motions a placé en tête, avec 27,8 %, celle de Guillaume Peltier, transfuge du Front national, dite de « la droite forte ».
J’ai voté pour la droite humaniste (NDLR : motion de Jean-Pierre Raffarin, 18,1 %)

Si on additionne la « droite forte » et la « droite populaire » de Thierry Mariani, l’aile dure de l’UMP pèse plus de 40 %. Ceci explique-t-il les dérapages droitiers de Jean-François Copé et autres « pains au chocolat » ?
Aujourd’hui, à droite, il ne faut pas avoir honte de nos valeurs. Nous voulons un pays dont nous sommes fiers. Que nous ne puissions pas accueillir toute la misère du monde ne nous choque pas, mais il faut aider les gens qui sont là.

La droite forte réclame l’abolition du droit de grève des enseignants, une charte républicaine pour les musulmans, un quota de journalistes de droite dans les médias…
(Rires) Ça ce serait bien, parce qu’il n’y en a pas beaucoup ! Je n’ai pas voté pour Pelletier parce que je trouvais que certaines de ses propositions étaient un peu excessives. Mais elles interpellent ! Et pourquoi ? Parce que les gens en ont assez de ne pas pouvoir sortir comme ils le veulent, d’être bousculés. Ils en ont assez que certaines communautés essaient de leur imposer leur mode de vie. On est quand même dans un pays laïc et républicain…

Allez-vous écouter les militants de l’UMP qui réclament une alliance avec le Front national ?
Non. Notre histoire est complètement différente de celle du Front national. Nos idées sur l’euro, sur l’Europe, sur l’économie, n’ont rien à voir. Mes grands-parents n’étaient pas français, par contre ils ont su s’intégrer, m’apporter les valeurs de la France, du travail, du respect, de la famille.

Vous opposez-vous au mariage pour tous ?
Ce n’est pas un problème politique mais sociétal. Pour moi, le mariage a une signification de procréation. Peut-être que c’est mon éducation judéo-chrétienne qui joue.

Tout autre sujet ! Le juge Duchaine a demandé une nouvelle fois la levée de l’immunité parlementaire de Jean-Noël Guérini auprès du Sénat. Qu’en pense la présidente de l’opposition UMP au Conseil général ?
Le juge Duchaine doit avoir ses raisons.

Depuis le retrait de Renaud Muselier, la droite locale, Jean-Claude Gaudin en tête, se fait discrète sur la mise en examen du président du CG. Pourquoi ?
Sur les 57 conseillers généraux du département, nous ne comptons que 17 élus. Nous ne pouvons pas grand chose. Depuis le mois de septembre 2011, je réclame la démission du président Guérini.

Sans tenir compte de la présomption d’innocence ?
Une personne mise en examen avec des responsabilités aussi importantes devrait laisser sa place quitte à pouvoir, après son jugement, si elle s’avère innocente, retrouver ses prérogatives. Mais le droit aujourd’hui ne le prévoit pas !

Soutenez-vous le projet de grande métropole marseillaise défendue par le gouvernement ?
Marseille toute seule ne peut pas grande chose. L’inverse est aussi vrai ! Il est capital de ne pas faire une métropole qui soit trop large et ingérable. Mais il faut faire une métropole, non pas pour que Marseille cannibalise les autres ou faire disparaitre les communes, mais pour mettre en place un pôle d’échange. Seulement pourquoi le gouvernement veut-il précipiter à ce point les choses ?

Peut-être pour débloquer une situation au point mort depuis des décennies !
Il faut avancer mais de là à vouloir mettre tout le monde d’accord d’ici le mois de mars… Quels seraient le montage financier et le mode de gouvernance d’une métropole ? Ce que je reproche surtout au gouvernement c’est de ne pas écouter.

Marseille, qui mise sur la capitale européenne de la culture pour améliorer son image, semble rattrapée par les vieux clichés sur la Chicago provençale. De fait, les règlements de compte y sont quand même fréquents !
Tous les matins, il y a des gens qui se lèvent et qui vont travailler, qui apportent du bien à cette ville. Ces gens-là, il faudrait plus en parler.

On met la poussière sous le tapis et on n’en parle plus ?
Pas du tout ! Les problèmes de sécurité existent mais ils ne sont pas uniquement marseillais. Tant qu’on ne réglera pas le problème des trafics de drogue, de ces arrivées en direct du Maroc, cela continuera.

Tant qu’il y aura des flics ripoux comme ceux de la BAC Nord…
Ce n’est pas beau, ça. Les policiers sont honnêtes, ils font leur boulot. Mais quand ils voient qu’après avoir arrêté un jeune dealer, après avoir essayé de remonter la filière, que le même jeune est dehors et recommence à dealer la semaine suivante, ce n’est pas facile.

Comment combattre la cassure marseillaise entre les quartiers Nord et Sud ?
Il n’y a pas de cassure. Je vais me promener assez souvent dans les quartiers Nord, je vous assure que dans les quartiers Sud on a aussi les mêmes problématiques.

La majorité municipale souffrirait-elle de cécité ?
Non je vois très bien, et j’entends bien aussi. Il n’y a pas de déni, la société a changé. Nous aimons profondément notre ville.

Objectivement, cela ne veut rien dire
Si ! On aime notre ville. Objectivement !

Propos recueillis par Michel Gairaud et Rafi Hamal, mis en forme par Mathieu Tourlière