Y a-t-il un pilote à Notre-Dame-des-Landes ?
Aujourd’hui, tu luttes, demain, tu mutes ? Le site Basta vient de faire une jolie mue numérique, avec, pour nourrir sa campagne de don, un titre qui en dit long : « Basta fait sa révolution ». La télé de rue Primitivi, avec son film « La bataille de la Plaine », se permet, pour étayer la chronique de la lutte sur cette place du centre-ville de Marseille, de faire quelques incartades du côté de la fiction.
Il est en revanche une page Facebook qui, elle, est partie en « live », c’est celle du groupe « Contre l’aéroport Notre Dame des Landes », né en 2009, et qui compte près de 25 000 membres ! Parmi lesquels Denis Rougé, un « historique » de l’éducation aux médias, notamment avec Les Pieds dans l’Paf. Et qui bataille contre les publications qu’il juge indignes d’un tel groupe : « On croirait que la bataille contre l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes a été gagnée par… l’extrême droite ! On peut y lire des propos homophobes, sexistes, des posts Pro-Trump, pro-Zemmour, anti-vax ou même anti-écolos. » Dernier exemple ? Le commentaire d’un habitué en réaction à un post sur le rapport Sauvé : « L’élite pédosataniste a infiltré l’église pour la détruire de l’intérieur ! »
Même si ce type de publications est monnaie courante et que la lutte sur la ZAD est loin d’être uniforme (ou même terminée), voilà qui interroge. « Le pire, déplore Denis Rougé, c’est que, lorsque je bataille contre ces publications, c’est moi qui finis par me faire exclure. »
Derrière ce groupe, il n’y a qu’un administrateur, Stéphane Masson. Lorsqu’il ne relaie pas les analyses du patron de l’UPR, François Asselineau (ou fait de la promo pour TV Libertés, un média d’extrême droite), ce dernier s’enorgueillit, pour son 10e anniversaire, d’être à la tête d’« un groupe qui s’est révélé au fil des années un lieu privilégié de débats » où « l’expression est totalement libre ». Et d’évoquer du bout des lèvres « les polémiques qui ont émaillé des discussions devenues parfois incontrôlables ». Mais « le succès ne se dément pas ».
Interrogé par le Ravi, celui qui avoue être « extérieur à [la] lutte » de NDDL se fait plus mesuré. Pour Stéphane Masson, « l’âge d’or » du groupe est révolu. Lui-même y « passe beaucoup moins de temps », souhaitant « intervenir le moins possible ». Car, selon lui, « c’est justement cela qui fait l’intérêt [du groupe] : être un endroit imprévisible et incontrôlable où les débats peuvent dégénérer – comprendre partir dans toutes les directions – à tout moment ».
Soupir de Denis Rougé : « Même si on est quelques-uns à porter la contradiction, la plupart s’en fichent. Parce qu’avec cette page, vous avez potentiellement une audience de 25 000 personnes. » Avec de bons clients, comme ce naturopathe marseillais anti-vax qui, après des débuts au Modem, oscille entre Philippot et Zemmour. Nul doute qu’il devrait apprécier la dernière saillie du polémiste à Béziers où, selon Le Monde, il aurait pointé « la justice, les médias, les minorités » et lâché : « Nous devons enlever le pouvoir à ces contre-pouvoirs. »