La gauche sans capitaine à l’assaut du CD 13

février 2021 | PAR Jean-François Poupelin
Les victoires à Marseille et aux sénatoriales donne des ailes à la gauche pour les départementales dans les Bouches-du-Rhône. Elle espère prendre sa revanche sur Martine Vassal. A voir.

Comme les trains, une élection peut en cacher une autre. Si tous les projecteurs politiques sont braqués sur les élections régionales de juin prochain, sauf nouveau report pour raison sanitaire, des départementales sont prévues au même moment. Scrutin binominal et très local, il est moins sexy. Mais à gauche dans les Bouches-du-Rhône des partis en font leur priorité. « C’est un enjeu peut-être plus important, en tout cas pour Marseille », admet Sébastien Barles, adjoint EELV à la transition de Benoît Payan, le nouveau maire PS. Et pour cause : le conseil départemental des Bouches-du-Rhône (CD 13) est une des collectivité les plus riches de France.

La gauche a de plus une chance de l’emporter. Elle n’a perdu que de trois cantons il y a six ans. Jean-Noël Guérini, l’ancien patron du PS 13 et du CD qui sera en procès dans l’affaire portant son nom à partir du 15 mars, a perdu de son pouvoir de nuisance. La droite et Martine Vassal, l’actuelle présidente LR de l’institution, sont menacées par leur extrême, en particulier dans le Pays d’Arles et le nord du Département. Du PS au PCF, chacun table aussi sur la poursuite de la dynamique de rassemblement des municipales et des sénatoriales autour d’un projet commun.

Les premières discussions ont ainsi eu lieu en janvier, entre simples contacts et échanges plus concrets. Députée européenne et première secrétaire fédérale du PS 13 jusqu’au 28 janvier, Nora Mebarek évoque « un accord sur les sortants avec le PCF dans le cadre des sénatoriales ». Guy Benarroche, sénateur et responsable régionale d’EELV, parle lui « de discussion non officielle sur les cantons ».

Citoyens ignorés

Mais si la « route est droite, la pente est forte », pour paraphraser Jean-Pierre Raffarin. Et la dynamique reste à construire. Élément essentiel de la victoire du Printemps Marseillais (PM) à Marseille, les citoyens en sont pour l’instant écartés. « Évidemment qu’on doit être de ces combats , plaide pourtant Olivia Fortin, présidente de Mad Mars, une composante du PM. Mais la constitution des binômes c’est une autre mécanique, il faut des personnalités. Ce scrutin n’est pas la meilleure occasion de faire émerger des inconnus. »

Le nom de l’adjointe de Benoît Payan a un temps été évoqué pour être la tête de gondole de l’attelage. Mais a été vite biffé. « On me prête beaucoup d’intention, mais je ne me suis jamais exprimé sur le sujet », balaie Olivia Fortin. « Il circule, mais pas pour cette élection », coupe également court la sénatrice PS Marie-Arlette Carlotti, sous-entendant une possible candidature de l’ancienne communicante pour les régionales.

L’autre nom qui a circulé au moment de l’intronisation de Benoît Payan en décembre, est celui de Samia Ghali (ex-PS), l’autoproclamée « Madone des quartiers Nord » et ancienne candidate aux municipales. Le nouveau maire de Marseille lui aurait promis la tête de liste aux départementales pour s’éviter un remake de l’élection de Michèle Rubirola, en juillet. Un accord que l’actuelle 3e adjointe ne dément pas, tout en se refusant à toute « déclaration, projection et extrapolation tant que le décret fixant les élections n’a été fixé », selon une proche.

« Quand on est élu, on anticipe les prochaines échéances et et je ne vois pas qui ne serait pas intéressé par le CD 13 », relativise Lisette Narducci, adjointe de Payan et candidate à sa succession sur le 2e canton de Marseille. Curieusement, aucun élu du PM n’a pourtant jugé utile d’interroger Benoît Payan ou Samia Ghali sur leur supposé accord en perspective des départementales…

Ghali nassée

L’hypothèse Ghali est en effet loin de faire l’unanimité. Elle n’a pas de troupes et ses exigences pour rallier le PM après le second tour des municipales ont laissé des traces. « Que sa candidature puisse faire capoter un accord, ça je peux l’entendre dans les discussions. Il y a beaucoup de ressentiments », assure le sénateur et président du PCF 13 Jérémy Bacchi. « Il faut quelqu’un qui rassemble, pas qui fracture », tacle également la socialiste Marie-Arlette Carlotti.

Pour l’instant, il semble surtout urgent d’attendre. Si d’autres noms circulent, comme ceux des maires de Miramas ou de Vitrolles, certains préfèrent évacuer la question. « Comme personne ne fait consensus, il ne faut pas entrer dans ce jeu et gagner les cantons », martèlent nos écolos. En cas de victoire de la gauche, ils verraient bien les résultats décider de la couleur et du futur président.

Chacun a aussi ses soucis internes à régler. EELV est en crise. Les écolos ont suspendu leur chef de file aux régionales après qu’il ait soutenu une liste d’union dès le premier tour. De son côté, le PS doit gérer les cas de deux sortants condamnés par la justice, Henri Jibrayel et Rebia Benarioua. Surtout, les socialistes ont à régler leur division interne entre Marseille et le reste du département au sujet de la métropole. Au risque d’avoir des stratégies différentes selon les territoires aux départementales. « La direction collégiale qui prend la suite de Nora Mebarek devrait simplifier les discussions entre nous et avec nos partenaires », veut croire Jean-David Ciot, le maire PS du Puy-Sainte-Réparade.

À voir. Alors que l’ancien premier secrétaire de la fédération plaide pour un chef de file hors Marseille, Laurent Lhardit, adjoint PS à l’économie de Benoît Payan, pousse pour une candidature rapide et marseillaise : « Depuis les municipales, le rapport de force est en notre faveur. »

* Contactés, ni les maires PS de Miramas et Vitrolles, ni le directeur de cabinet de Benoît Payan n’ont donné suite à nos sollicitations.