"Jean-Noël Guérini a toujours la majorité au conseil général"

novembre 2011 | PAR Michel Gairaud, Rafi Hamal
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Entretien en partenariat avec Radio Grenouille
Jean-David Ciot, premier secrétaire du PS 13, invité de la Grande Tchatche
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La direction nationale du PS vient de priver votre fédération du pouvoir d’investiture des candidats aux législatives. S’agit-il d’une mise sous tutelle ?
Je ne sais pas si la fédération a été mise sous tutelle, en tout cas nous continuons à la gérer. En cette période de campagne présidentielle, nous avons beaucoup à faire pour que la gauche gagne en 2012. J’ai dit à Martine Aubry que je regrettais cette décision car elle prive les militants d’une expression. Il y avait d’autres solutions.

Pourquoi ne pas appeler Jean-Noël Guérini à la démission comme la direction du PS ?
Cela relève des conseillers généraux. Je réclame pour ma part une règle claire et applicable pour tous : décidons par exemple l’inéligibilité des élus condamnés. Aujourd’hui, il n’y a pas de règle. Il faut donc pour l’instant faire prévaloir la présomption d’innocence. Concernant la présidence du conseil général des Bouches-du-Rhône, relevons que des conseillers généraux de droite comme de gauche ont maintenu leur confiance en faveur de Jean-Noël Guérini, ce qui prouve sa qualité. C’est à lui qu’il appartient de se mettre ou non en retrait.

Peut-on se contenter d’une position aussi prudente dans le cas d’une mise en examen sur un motif aussi lourd que celui « d’association de malfaiteurs » ?
Séance après séance, Jean-Noël Guérini a toujours la majorité au conseil général. Si certains, fort de leurs ambitions personnelles, veulent sa peau pour exister, ils ont tort. La solidarité en politique, c’est le seul moyen pour prendre des décisions applicables collectivement.

Jean-Noël Guérini est-il toujours votre ami ?
Il n’est ni mon ami, ni mon ennemi. Je l’ai toujours considéré comme un leader politique. Il a su créer de l’espoir. Aujourd’hui, son image est écornée à la suite des affaires de justice qui concernent son frère. Il a su en tirer les leçons en se mettant en retrait du parti. Personnellement, je garde la mémoire des combats difficiles que nous avons menés. Aujourd’hui, ne renions pas cet espoir mais prenons acte des difficultés judiciaires.

« Indignez-vous contre une situation qui fait de vous les otages d’une présidence en opposition avec les instances nationales du Parti socialiste, la collectivité régionale et la communauté urbaine, toutes deux dirigées par des socialistes ! » Eugène Caselli, le président PS de Marseille Provence Métropole, est donc dans le faux lorsqu’il s’insurge ainsi contre Jean-Noël Guérini ?
La vraie question qui se pose est celle de la gouvernance partagée à Marseille [NDLR, avec la mairie UMP]. Est-ce « la faute à Guérini » si les Marseillais ont le sentiment que leur ville n’est pas plus propre ? Eugène Caselli est légitime lorsqu’il s’exprime sur des sujets qui touchent les Marseillais, sur ce qu’il va faire pour le développement économique, pour la propreté, sur l’intérêt ou non d’un projet qui va superposer un tram au-dessus d’un métro comme l’a fait remarquer le président du conseil général…

Que vaut la parole politique lorsque, sur un dossier comme l’incinérateur de Fos-sur-Mer, elle n’est pas respectée ? Les socialistes refusaient l’incinération, promettaient la méthanisation… L’agglomération marseillaise qu’ils président s’apprête à brûler encore plus de déchets.
Eugène Caselli a dû revenir sur cette décision pour des raisons financières. La construction de l’incinérateur était à un niveau trop avancé. Mais je peux comprendre le sentiment de trahison d’un élu comme René Raimondi, le maire de Fos-sur-Mer…

Le rapport Richard sur le fonctionnement interne de la fédération prévoit une refondation des sections. Comment cela va-t-il se passer ?
On est en pleine négociation. Le but est de mettre en place des sections dont les adhérents habitent le territoire, avec pas plus de 250 membres, dont 20 % pourront venir d’ailleurs s’ils peuvent attester d’un lien historique avec la section en question, par exemple s’ils y ont travaillé ou s’ils y ont été élus. Se présenteront ceux qui le souhaitent et seront élus ceux qui auront obtenu la majorité.

Dans votre fédération rénovée, un Théo Balalas, fondateur du FN à Marseille et toujours adhérent de l’Adimad, association d’extrême droite, aura-t-il encore sa place ?
Malek Boutih a saisi sur ce sujet la Commission nationale des conflits. Théo Balalas étant toujours adhérent de l’Adimad (Association amicale pour la défense des intérêts moraux et matériels des anciens détenus et exilés politiques de l’Algérie française), la question de son appartenance se pose. Je lui ai demandé de faire un choix, il a dit qu’il démissionnerait de l’Adimad.

Et que pensez-vous de la volonté de François Bernardini, le maire d’Istres qui a autrefois dirigé la fédération et présidé le conseil général avant Jean-Noël Guérini, d’adhérer à nouveau au PS ?
Je ne suis pas totalement naïf. On me dit, au moment où Guérini est mis en examen, qu’il veut revenir. Je trouve le moment mal choisi ainsi que la forme. On n’adhère pas en payant une cotisation de vingt euros sur Internet quand on s’appelle Bernardini. Déjà, quand on est élu, on paye l’adhésion de 300 euros… On ne se moque pas des règles. S’il revient, ce n’est plus de la rénovation. Je suis contre le retour des vieux dinosaures de la politique.

Quand Arnaud Montebourg réalise 21 % aux primaires dans les Bouches-du-Rhône, 4 points de plus que sa moyenne nationale, est-ce une façon pour les électeurs de réclamer plus de rénovation ?
J’ai constaté cette volonté de changement, mais ce n’est pas un problème local. La preuve, dans le Vaucluse, Montebourg a fait 22 %. Nous devons écouter ses propositions qu’il a appelées « démondialisation »…

Au moment où Nicolas Sarkozy remonte, considérez-vous que François Hollande, que vous n’avez pas soutenu pendant les primaires, est un bon candidat ?
La vision de la social-démocratie de François Hollande me convient bien. Mais la campagne s’annonce longue et comme nous ne sommes pas au pouvoir, il n’est pas possible pour nous, comme le fait Nicolas Sarkozy, de s’appuyer sur les moyens de l’État.

Dominique Tian, à l’UMP, considère que son parti doit « se droitiser ». Le PS ne gagnerait-il pas à soigner sa gauche plutôt que son centre ?
La social-démocratie n’est pas le centre. La droite est en perdition car les gens ne croient plus en Sarkozy. Il est crédité de plus de 50 % d’opinions négatives, alors qu’Hollande est perçu en positif. Regardez : la droite conforte à nouveau avec excès son électorat populaire en légiférant sur la récidive à la suite d’un fait divers. Une surenchère, une énième loi, qui ne règleront pas les problèmes des Français ni ne redresseront la France.

À Marseille, le député UMP Guy Tessier, qui voudrait succéder à Jean-Claude Gaudin, déplore une ville « gérée au jour le jour ». Finalement, la droite est-elle aussi divisée que la gauche ?
Je suis au moins d’accord avec Guy Teissier sur l’absence de visibilité politique dans la gestion municipale. Jean-Claude Gaudin n’arrive plus à cimenter sa majorité comme on l’a vu pour le Parc national des Calanques. À gauche, dans des villes de la taille de Marseille ou d’Aix-en-Provence, nous pourrions envisager une primaire pour désigner les candidats socialistes aux municipales de 2014. Ce serait une bonne dynamique pour créer un leadership.