« Les guéguerres internes, c'est fini ! »

octobre 2018 | PAR Michel Gairaud, Rafi Hamal
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Entretien en partenariat avec Radio Grenouille
Nora Mebarek, première secrétaire de la fédération PS du « 13 », invitée de la Grande Tchatche

Pourquoi rester au PS alors qu’une partie de vos amis de l’aile gauche, avec Emmanuel Maurel, viennent de faire scission en se rapprochant des Insoumis ?

Depuis notre dernier congrès, en avril 2018, où je me suis engagée à prendre part à la refondation, rien n’a changé. Un parti c’est un outil, une maison commune. Honnêtement le PS est en situation très difficile dans un espace bloqué entre Mélenchon et Macron. Mais cet espace est en train de s’agrandir car ceux qui ont cru que Macron pouvait être « ni de gauche ni de droite » comprennent, au bout d’un an, qu’il est plutôt « de droite et de droite ». Même si c’est à Mélenchon, le premier candidat de gauche arrivé en tête à la présidentielle, de rassembler l’électorat, le PS peut encore faire des propositions afin d’agréger la gauche de gouvernement.

Marc Vuillemot, le maire socialiste de la Seyne-sur-Mer, a choisi à l’inverse, de quitter un parti selon lui « inexistant » et impuissant à « rassembler ». Que lui répondre ?

Je le connais bien. Il est le président de l’association des maires « Villes et banlieues de France ». Son conseil municipal va de l’extrême gauche, avec le NPA, jusqu’au Modem. J’encourage mes camarades, quel que soit leur choix, qu’ils restent ou non au PS, à savoir faire, comme Marc Vuillemot, le rassemblement autour d’un projet.

Comment réagissez-vous au coup de sang de Mélenchon, le député de Marseille, suite aux perquisitions le visant ainsi que des cadres Insoumis ?

J’en appelle toujours à la raison. Lorsqu’on se réclame de la République, on doit respecter ses institutions et notamment les forces de l’ordre et la justice. Après on peut comprendre que, en tant qu’homme, il ait été blessé et, qu’en tant qu’un chef de l’opposition, il s’interroge sur les dessous pas forcément clairs de l’opération. Il a des arguments, la justice fait son travail, passons maintenant à autre chose ! Et puis Mélenchon ne va pas être candidat dans les 36 000 communes de France j’imagine. Derrière lui il y a des personnes, qui sont souvent des anciens camarades socialistes ou du PCF avec lesquels il faut discuter.

Olivier Faure, le 1er secrétaire du PS, fustige le populisme des Insoumis. Pas vous ?

Dans populisme il y a peuple, c’est ça le souci ? Plein de fois, lorsque j’entends parler les dirigeants nationaux, je ne les comprends pas. Les responsables politiques doivent se demander pourquoi les gens s’abstiennent, ne nous croient plus. Donc reparler au peuple en format peuple, avec pédagogie : oui ! Mais en étant fiable. Quand on dit des choses, on les fait !

Un mot sur la fulgurante ascension de Christophe Castaner, aujourd’hui un pilier de la Macronie, qui était encore votre tête de liste aux régionales en 2015…

Comme quoi quand on est à 14 % et qu’on perd au 1er tour des élections régionales, trois ans après on peut être chef de parti puis ministre de l’Intérieur. Donc cela prouve que tout reste possible pour le PS et la fédération du « 13 » ! Mais l’idée de Macron, le président des très riches, d’une société fonctionnant avec des premiers de cordée, qui mangent grassement, face à un peuple se contentant de ce que les élites auraient envie de redistribuer, n’est pas ma conception.

Etre à la tête de la fédération du PS « 13 », dans un contexte de crise et au regard de son passé tumultueux, est-ce vraiment un cadeau ?

Je n’ai pas pris mon élection comme un cadeau mais comme une responsabilité. Aujourd’hui on est dans une passe très difficile. Je suis implantée sur le plan local depuis longtemps, je ne suis pas candidate à la municipale pour mon territoire. Donc j’ai du temps, de l’énergie à offrir à ma fédération et à ses militants. Ne pas être marseillaise, c’est un atout car je ne sais pas qui, avant, marchait avec qui et faisait quoi. Cela m’aide.

Vous n’êtes tout de même pas amnésique : toutes les querelles, les mises en examen !

Les guéguerres internes, c’est fini car je n’ai plus que les militants, à part Samia Ghali, la dernière parlementaire en exercice. Je n’ai jamais siégé ni au département ni à la région. Du coup, j’ai un rapport politique aux enjeux et non personnel. On ne peut pas me soupçonner d’être pour une chapelle ou pour une autre. Après, concernant les procédures de la justice, je n’ai pas été élue procureure mais 1ère fédérale du « 13 ». Mon objectif est que cela fonctionne en donnant des moyens aux secrétaires de section…

Serez-vous en ordre de marche pour les élections locales qui se préparent dès 2019 ?

La fusion métropole-département va changer la donne avec un scrutin de liste. Et l’avantage au PS d’être moins nombreux c’est d’être plus serein car chacun trouvera une place dans un dispositif regroupant en même temps deux élections, la communale et la métropolitaine. L’objectif est la reconquête des mairies socialistes et la conquête de nouvelles. Marseille est un sujet important. Cela doit être un enjeu national pour le PS. Et puis j’ai une ligne : est-ce que le « 13-14 » (mairie marseillaise de secteur emportée par l’extrême droite, ndlr), si cela n’emmerde personne, peut revenir dans la République ? Cela doit être un symbole pour l’ensemble des partis. Il faut arrêter ce scandale et faire élire le mieux placé pour battre le RN (ex-FN) : un marcheur, un insoumis, un communiste, un vert, un socialiste, un société civile, peu importe…

Pourquoi mener bataille contre l’absorption du pays d’Arles dans la métropole Aix-Marseille-Provence ?

Je ne suis pas opposée au scénario de la fusion du périmètre du département avec celui de la métropole actuelle, car il faut lui donner les moyens de fonctionner ce qui n’est pas actuellement le cas. Mais le pays d’Arles, regroupé dans une intercommunalité unique, doit rester autonome au côté d’une métropole ayant repris les prérogatives du département après sa disparition. Notre territoire regroupe 29 communes, 9 % de la population du département et 40 % de sa superficie. Il est en interface avec le grand delta – le Vaucluse, le Gard et les Bouches-du-Rhône – et deux régions, l’Occitanie et Paca. Nous organisons le 9 décembre une consultation populaire qu’il faudra prendre en compte. Notre bassin de vie n’est pas le même que celui de Marseille. L’identité du pays d’Arles ne peut pas être dissoute dans une mégapole de deux millions d’habitants qui deviendrait la plus grande de France.

Martine Vassal peut-elle, selon vous, à la fois présider le CD 13 et la métropole Aix-Marseille-Provence ?

Ce n’est pas ma conception de la démocratie. Je l’ai dit le lendemain de son élection par ses pairs car ce n’est pas le peuple qui l’a désignée. Elle aurait dû décider de démissionner du département. C’est très dangereux, comme toujours, de laisser dans les mains d’une seule personne l’ensemble des budgets de deux exécutifs aussi importants dans les Bouches-du-Rhône.