Classe verte de la presse pas pareille !

juin 2021 | PAR Alicia Arquetoux
Les niçois de Mouais ont organisé les premières Assises de la presse transnationales et intergalactique de la presse libre, satirique et indépendante. Une vingtaine de médias, tout support et tout-terrain, sont venus afin de construire, au-delà de leurs difficultés financières, un réseau d’entraide et de coopération.

Sous le cruel soleil de la Côte d’Azur, s’est réuni, du 4 au 6 juin, une vingtaine de médias du réseau informel de la presse pas pareille pour les premières Assises transnationales et intergalactique (rien que ça !) de la presse libre, satirique et indépendante. Médias citoyens [Le Nouveau Journal des Gens du Pays de Fayence (Var)], canards impertinents [La Brique (Lille)], revues alternatives et écologistes ([L’âge de Faire (Alpes-de-Haute-Provence), S!lence (Lyon), Transrural initiatives (Paris)…), radios libres (Agora FM (Grasse), « les Autres voix de la Presse » de radio MNE (Mulhouse)], presse critique [CQFD (Marseille), L’Empaillé (Aveyron), Acrimed (Paris)…], ont fait travailler leurs méninges à la ferme de la Sauréa (Tourrette-Levens) où se sont déroulées les assises. Aux absent.es : « dédicaces à personne, fallait être là. »

Malgré des tribulations joliment racontées par Eloïse Lebourg de Mediacoop (Clermont-Ferrand), venue d’Auvergne en covoiturant depuis Marseille avec le journal régional qui ne lâche pas le volant, le Ravi a fini, lui aussi, par rejoindre l’événement sain et sauf. Sur les lieux, les bénévoles du mensuel dubitatif Mouais (Nice) se pressent encore pour accueillir la fine fleur du journalisme. Après un pique-nique sur des bottes de foin, où même Sebastien Boistel du Ravi aurait pu passer pour la plus tendance des influenceuses Cottagecore, vient l’heure de retrouver nos tentes. Le lendemain, si certain.es partent couvrir la manifestation « Toutes aux frontières » d’autres restent sur place pour la première journée de discussion.

Lors de l’atelier « cambouis  », tout le monde remonte ses manches. Pour mieux investir la Coordination permanente des médias libres (CPML), déjà relancée en 2014, il est question de mutualiser ses ressources. Quelles soit humaines (web-designer, comptables…) ou matérielles (locaux, réseaux de distribution…). Quand on est petit, chaque euros économisé compte alors il faut parler FSMIP (Fond de soutien à l’information sociale de proximité)  ou CPPAP (Commission paritaire des publications et agences de presse)… Monter des enquêtes collectives, travailler en bi-média, donner la parole aux collègues sous forme de brèves, permettraient d’enrichir les productions journalistiques de chacun.es tout en dégageant du temps libre pour traiter d’autres sujets…

On se débat comme on peut

Les jeunes du Poing (« avec un g et pas un t ») et de La mule du Pape (Montpellier) ou encore de L’Arlésienne (Arles) ont aussi bénéficié des conseils des plus expérimentés dans leur recherche d’un modèle économique viable et vivable car comme résume Philémon de Mouais : « On est anarchiste et subjectif […] mais se salarier, ce serait merveilleux ! »

Activité récurrente du week-end : débattre sur la sacro sainte objectivité journalistique. Souvent utilisée comme bouclier anti-médias indépendants, elle fait consensus ici sur son « i-n-e-x-i-s-t-e-n-c-e ». Une enseignante intervient : « Ça me fait penser au travail de Philippe Rekacewicz qui dessine à la main ses cartes pour en faire ressortir le caractère subjectif. » Même une « science dure » comme la cartographie est donc sensible aux représentations de son auteur.e. Assumer et revendiquer son engagement tout en documentant avec rigueur ses arguments semble être la solution pour plusieurs médias présents. Avoir un positionnement militant est-il problématique ? Sourires dans l’assemblée. Quel journaliste n’est pas le militant de sa propre idéologie ou de celle de son journal ? Les liens entre journalisme et sciences sociales sont aussi questionnés notamment sur « les ressemblances dans les techniques d’enquêtes et d’entretiens ».

Entre deux ateliers, les invités peuvent profiter d’une conférence gesticulée en totale exclusivité de Philippe Merlant, d’un atelier langue de bois de Julien Dupoux du Trou des Combrailles (Creuse), d’une performance des Crieuses d’Utopie (Grasse) et d’une projection du documentaire « La Bataille de la Plaine » par Primitivi (Marseille). Sans oublier, le soir venu, repas partagé « bio et local », buvette, fanfare et concert !

Une nouvelle édition devrait avoir lieu l’année prochaine pour faire le point, cette fois-ci avec un t et pas avec un g, sur l’avancée des projets… À la rentrée se tiendront également les Rencontres nationales des Médias libres et du journalisme de résistance de retour à Meymac (Corrèze) après une édition à Clermont-Ferrand. En attendant, des rendez-vous informels s’organisent entre médias pour continuer les discussions qui n’ont pas pu être achevées en deux jours.

Merci aux membres de Mouais et Pilule Rouge (Nice) pour l’organisation de l’événement, pour leur énergie et leur bienveillance inépuisable. Et merci à Télé chez moi (Nice) pour avoir immortalisé ces précieux moments