« La liberté ça n’est pas négociable »

janvier 2022 | PAR Jean-François Poupelin
Doyens de la pension de famille Labadié, Jean et Vincent revendiquent leur indépendance et leur liberté. Témoignages.

Jean Boyer (80 ans) : « Je suis libre »

« [Ici], je suis libre, je fais ce que je veux de mes journées, sans avoir à prévenir. Si je n’avais pas eu cette liberté, je ne serais pas [à la pension de famille]. Ou alors en dépannage, quelque temps. Avec Sabrina, la salariée qui m’accompagnait, on avait été en voir une comme ça, mais ça m’a pas plu. Il fallait prévenir quand on sortait et quand on rentrait. Alors là pas d’accord, pas de liberté, trop de contraintes. Et ça faisait hôpital. Je ne suis pas dans cet état là.

Un patron intelligent, il me gardait. S’il était con, il ne me gardait pas longtemps. Et ça ne m’a jamais posé de problème parce que même si j’étais à vide, ça me faisait des vacances. J’étais libre. Je me suis marié très jeune, après j’ai divorcé. J’ai vécu en couple en Normandie quelque temps, après je suis parti. Je ne tiens pas en place. Maintenant je me suis calmé. Quand je suis parti de Normandie, je me suis senti libre, comme un roi.

Mais quand ça marche, ça marche. Avec ma compagne, on est toujours ensemble, on se voit souvent. Mais chacun chez soi pour une question d’accord. [La liberté, l’indépendance] ça n’est négociable pour personne. Il y en a qui aiment se faire plaindre, qui aiment être dépendants des autres, mais moi c’est pas mon genre. »

Vincent Gargiulo (82 ans) : « Je ne peux pas rester enfermé »

« Je suis un solitaire. J’avais dit, moi je ne veux pas m’ancrer, je fais ce que je veux, sinon je ne viens pas. On m’a dit : “Tu es libre, tu es chez toi.” Donc, je reçois qui je veux, je fais comme tout le monde. J’ai la chance que je peux marcher, je vais jouer aux boules l’après midi. Je ne peux pas rester enfermé. Je sors. Le matin, quand il fait beau, je vais au port retrouver des amis.

Mais au premier confinement, je suis tombé malade. Une nuit, je l’ai passée sur le sol de mon appartement. Je n’arrivais plus à avancer, ni à parler, je ne pouvais pas attraper mon téléphone. C’est Philippe, qui vient tous les jours frapper à la porte, qui m’a trouvé le matin. J’ai été hospitalisé puis je suis resté 15 jours en maison de repos. J’avais une grosse grippe mais aussi une grosse dépression. Le fait de rester enfermé, je ne pouvais plus sortir. »

Propos recueillis par J-F P.