Gap poursuit son cinéma

septembre 2012
Le pire semble évité concernant l’avenir de deux des trois cinémas de la ville. La municipalité est intervenue, l’établissement public foncier régional a investi, mais la projection reste floue.

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Tout commence en 2010 lorsque Mgr Di Falco, évêque du diocèse d’Embrun et de Gap, annonce la vente en bloc d’un groupe de bâtiments en plein centre-ville, abritant deux cinémas (le Centre et le Club, ce dernier affichant le label art et essai) et une bibliothèque. Moins connu pour sa politique de rationalisation des biens que pour son boys band religieux « Les prêtres », Di Falco a de grands projets comme l’agrandissement du sanctuaire Notre-Dame du Laus. Le hic, c’est que le prix demandé est trop élevé. Le diocèse décide alors de tronçonner le tout pour vendre par lots. Mais la conférence Jeanne d’Arc, qui assure la gestion et la programmation des cinémas (1), n’a pas les moyens de racheter les locaux qui lui sont prêtés par le diocèse. Tout juste peut-elle aujourd’hui financer le passage au numérique de son matériel.

« Quand on s’est aperçu que le diocèse comptait vendre par lots, je me suis dit qu’il fallait faire quelque chose, claironne Roger Didier, maire UMP de Gap. Premièrement, ça aurait été une erreur en matière de rénovation urbaine de laisser filer ces lots et puis cela revenait à abandonner un pan entier de l’offre culturelle gapençaise. » Entre-temps, une association de soutien aux cinémas s’est formée, des pétitions signées… Mais la mairie n’a pas non plus les moyens de se porter acquéreur de tout le lot. C’est là que le sauveur entre en jeu : l’établissement public foncier régional (EFPR), chargé de porter financièrement les projets d’urbanisme des collectivités territoriales, est contacté. Sauveur puisque selon la mairie, la somme versée au diocèse sera totalement prise en charge par l’EFPR sans demande de remboursement (4 millions d’euros selon l’opposition). Information impossible à vérifier puisque l’EPFR, qui investit grâce à des fonds de l’Etat, ne communique pas. Reste qu’une convention entre mairie et EPFR a été signée fin juin et que la vente devrait être actée en juillet.

Jean-Claude Eyraud, conseiller municipal d’opposition Front de gauche, est (pour une fois) satisfait de la solution trouvée par la mairie. « Notre plus grande crainte était qu’un promoteur privé fasse main basse sur le lot. Les termes de la convention restent encore un peu flous mais même si la mairie ne paie rien, elle devra investir pour monter un projet cohérent dans cette zone stratégique de la ville. Nous serons très vigilants là-dessus », rappelle l’opposant en soulignant que ce dossier sera au cœur de la campagne municipale de 2014. Le maire le sait bien : « Nous prévoyons bien sûr de garder les cinémas et la bibliothèque, mais aussi de construire des logements, dont 20 % seront sociaux, des commerces et pourquoi ne pas accueillir une enseigne culturelle par exemple ? » Plutôt Fnac ou Virgin monsieur le maire ?

La ville assure ne pas vouloir s’immiscer dans la gestion des deux cinémas et continuer à travailler en bonne intelligence avec la conférence Jeanne d’Arc. « Il va falloir remettre à plat notre fonctionnement, affirme Jean-Paul Reynier, membre de la conférence, directeur et programmateur du Club. J’attends que la mairie nous soutienne financièrement, notre structure devient obsolète. Ce que ne partagent pas vraiment les autres membres de l’association, dont j’ai toujours été un peu en marge… » Bref, si les meubles sont sauvés, l’évolution de ces deux cinémas et de leur politique culturelle est encore floue.

Clément Chassot

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