Brignoles, conseil municipal du 20 avril 2006

mai 2006
Tous les mois, un grand reporter du Ravi « teste » incognito un conseil municipal dans une ville ou un village de notre belle région...

18h27 Alors que quelques conseillers de l’opposition devisent joyeusement de la probable qualification de l’OM pour la finale de la Coupe de France, Consolato Verducci (UMP) fait son entrée. Coup de taureau, teint hâlé, chemise ouverte, crâne rasé et ventre en avant, il se rue sur Simone Gras, conseillère d’opposition, et attaque sans autre forme de politesse : « Lors de la dernière réunion, vous m’avez traité de… ! » Interloquée, la quinquagénaire se défend timidement : « Je vous ai simplement demandé de réfléchir ! »

18h36 Jean-Claude Guercin, maire UMP de la ville, ouvre la séance en déplorant le retard, peut-être, l’absence de Jean-Claude Gasso, son 4e adjoint en charge des travaux communaux. 30lop_bonnot.jpg 18h42 Jean-Michel Rousseaux, 6e adjoint aux finances et à la gestion de la trésorerie, achève à peine de détailler le financement de l’installation d’un système de vidéosurveillance dans la ville (délibération 1) que Simone Gras s’empresse de demander la parole et s’emporte : « Encore une fois, nous n’avons pas été associés au dossier ! Nous ne sommes pas contre, car l’insécurité dérange beaucoup, mais nous nous abstiendrons. »

18h49 Droit dans ses bottes et sur sa chaise, dans son complet gris rehaussé d’une chemise bleue et d’une cravate rayée, Jean-Claude Guercin a conservé quelques réflexes de son passé militaire. Ancien colonel des CRS, sous-préfet honoraire, caustique, il constate : « Sept abstentions sur une question de sécurité… »

18h50 Dès la fin de la lecture par Jean-Michel Rousseaux de la délibération 3, Simone Gras manifeste son soulagement : « Quand on l’a lue, on a rien compris. Maintenant c’est plus clair. » Des éloges aussitôt reprises par Jean-Claude Guercin : « Madame Gras, vous ne direz jamais assez de bien de monsieur Rousseaux. » Tête haute et lunettes vissées sur le nez, l’adjoint, quadra aux allures de jeune loup de l’UMP, boit du petit lait.

18h55 Discrètement, le premier citoyen, une citoyenne, fait son entrée : le public passe de zéro à un spectacteur.

18h56 Pierre Lorenzini, 7e adjoint en charge de l’enseignement, se met en mouvement. Frère jumeau de Consolato Verducci, une crinière argent en plus, il se gratte, la tête puis le cou, et reprend sa pose initiale, bras croisés et regard dans le vide.

18h57 Reinette Mithouard, pour l’opposition, prend la parole et, d’une voix ferme, place la banderille préférée de son groupe : « Nous sommes toujours très contents de découvrir des chiffres passionnants, mais pourquoi n’avons-nous pas participé au comité de pilotage ? » Elle promet donc l’abstention. Apparemment las, Jean-Michel Rousseaux, coudes sur la table et lunettes à la main, fait la moue.

18h58 Fabienne Giraudo, conseillère UMP, s’installe et s’empresse de rattraper son retard… en ouvrant son courrier.

19h03 Ennuyé, Jean-Claude Garcin constate que Jean-Claude Gasso n’est toujours pas arrivé et décide de présenter la délibération 6 à sa place.

19h12 Du regard, l’opposition se consulte, mais hésite à prendre la parole. Encouragé par Claude Gilardo, le président du groupe, Jean-Paul Jaubert se lance et résume le sentiment de ses colistiers : « J’ai pas bien compris les travaux complémentaires envisagés. » Jean Ridelle-Berger, conseiller délégué notamment « aux nuisances sonores et olfactives » (sic), réexplique les enjeux de la délibération 8 qui concerne des forages hydrauliques. Pas plus éclairée, Simone Gras revient à la charge. Après d’autres explications, Jean-Claude Garcin, d’un ton sec mais courtois, prend les choses en main. Ses précisions ne semblent pas sortir l’opposition de son brouillard. Elle vote malgré tout la délibération.

19h16 D’un coup de pied très sûr, Patrick Paris, conseiller d’opposition, envoie valser le fil de son micro.

19h25 Le maire déplore une nouvelle fois l’absence de Jean-Claude Gasso et décide, véritablement attristé, d’annoncer la délibération 9 concernant un appel d’offre pour la mise aux normes de sécurité d’une maternelle. Décidée à jouer son rôle, Simone Gras prévient : « Nous allons voter contre, je peux vous expliquer. » Irrité, Jean-Claude Guercin la coupe : « Si vous voulez voter contre, votez contre, nous on va voter pour ! »

19h41 Alors que le conseil s’anime à l’occasion de délibérations sur l’élargissement de chemins communaux, Consolato Verducci s’inquiète. « Est-ce qu’un jour ces terrains deviendront constructibles ? », interroge-t-il avant de préciser, un peu gêné : « je suis propriétaire d’une parcelle, et je voulais m’informer. » Jean-Claude Guercin, agacé : « Ca n’a rien à voir ! »

19h48 Les discussions sur le passionnant enjeu des chemins se poursuivent. Consolato Verducci s’empare d’une feuille blanche et d’un stylo et se fend d’un superbe dessin pour illustrer toutes les problématiques à sa voisine, Fabienne Giraudo.

19h50 L’unique et courageuse Brignolaise quitte les rangs déserts du public dans l’indifférence générale.

19h55 Didier Romieux, bonhomme et voix lancinante, annonce que la municipalité demande une subvention à la communauté de communes pour financer le logement conventionné. Claude Gilardo réagit immédiatement : « Bien sûr que vous aurez les subventions. » Le maire est en effet aussi le président du Comté de Provence. Il se délecte d’expliquer longuement les résultats de la politique d’incitation de l’institution communautaire. Avant de conclure, faussement modeste : « Je pense qu’il n’y aura pas de difficulté. » Claude Gilardo se fait piquant pour la première fois du conseil : « Je le redis, mais il faudrait que tout le monde fasse du logement social, même les communes les plus riches. »

20h02 Olivier Schellenberger, conseiller de la majorité, totalement indifférent aux débats, comme la plupart de ses collègues, baille et s’inquiète de l’heure. A leur décharge, Jean-Claude Guercin fait preuve d’un autoritarisme teinté de paternalisme qui leur laisse rarement l’occasion de s’exprimer.

20h03 Surfant sur le succès de ses talents de dessinateur, Consolato Verducci fait les yeux doux et la discussion à une Fabienne Giraudo apparemment embarrassée par tant d’attention.

20h15 Ayant épuisé tous les sujets d’une discussion entamée une heure plus tôt, Reinette Mithouard et Jean Larussa rangent leurs affaires.

20h16 Le grand reporter du Ravi résout une énigme ! Renseignement pris auprès du directeur du cabinet du maire, il apprend que le très solitaire Jean-Paul Dispard – situé en fin de rangée et séparé d’une place vide de Fabienne Giraudo – est l’élu FN de Brignoles. Sans jamais intervenir, il a voté toutes les délibérations.

20h21 Jean-Michel Rousseaux, affiche à la main, fait part de son « indignation » et de son « incompréhension » vis-à-vis du visuel choisi par le comité organisateur de la Foire de Brignoles. Une photo de Saint-Tropez y trône en lieu et place de celle de Brignoles… Jean-Paul Jaubert, propose de « boycotter » l’événement. « Tout le monde peut faire des erreurs », temporise le maire en prônant la clémence. Solution à laquelle se rallie immédiatement Claude Gilardo. L’incident est donc clos. Le conseil également.

20h27 A la sortie de la salle, le chef de l’opposition interpelle tout sourire le grand reporter du Ravi. Reconnaissant, il lui lance : « Ca fait plaisir de voir un Brignolais au conseil ! »

Jean-François Poupelin

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