Lambesc : Conseil municipal du 13 août 2009

septembre 2009
Tous les mois, un grand reporter du Ravi « teste » incognito un conseil municipal dans une ville ou un village de notre belle région...

« Il y a une procédure ? »

18h30 La victoire du socialiste Jacques Bucki en mars 2008 – sur un conglomérat des trois listes opposées (1) au sortant UMP Bernard Ramond (prime au meilleur score au premier tour) – a redonné aux Lambescains le goût de s’intéresser à la vie de leur petite commune : alors qu’ils n’étaient que cinq lors du passage du grand reporter du Ravi au conseil municipal du 25 janvier 2006 (n°27), ils sont dix à s’être déplacés en cette chaude soirée d’août ! C’est dire…

18h35 Physique de pilier de rugby, chemisette jaune pinson (un stylo dans la pochette) parfaitement accordée avec son visage plus rouge que bronzé et lunettes discrètes, le maire ouvre la séance en passant la parole au public. Une de ses premières décisions. Un retraité s’inquiète de la disparition des espaces verts et des arbres au profit des projets immobiliers de son prédécesseur et l’interroge sur la possibilité de faire « de la verdure une priorité dans les aménagements ». Jacques Bucki lui répond par une belle langue de bois : « Dans les semaines à venir, nous allons réfléchir à une politique sur le sujet. » Si le Royalisme n’est pas mort, la démocratie participative a ses inconvénients…

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18h42 Le maire retrouve le sourire. « Je voudrais qu’on félicite le nouveau papa », badine l’ancien cofondateur et PDG de Théolia, une entreprise spécialisée dans la production d’électricité à partir des énergies dont il a fini par être remercié, en se tournant vers Frédéric Bounous, un de ses conseillers municipaux. Le trentenaire pique un fard sous des applaudissements polis.

18h43 Dans la foulée, Bernard Ramond bougonne : « J’ai fait une remarque à la fin du conseil du 28 mai qui n’apparaît pas dans le compte-rendu. » Jacques Bucki, circonspect : « Je ne m’en souviens pas, je ne ferai donc pas de commentaire. Qui veut en faire un ? » Quelques timides remarques dans la majorité prouvent que son prédécesseur n’affabule pas, mais elles s’éteignent dans un silence gêné. « Vous faites ce que vous voulez. Vous l’inscrivez ou vous ne l’inscrivez pas », persifle le médecin-conseil à la retraite, un quinqua sec et au visage dur. Ambiance…

18h51 Jeanne Meunier, la cinquantaine longiligne et grisonnante, majorité tendance Lambesc Autrement, se bat avec la télécommande de la climatisation de la salle. Avant d’abandonner, vaincue par la technologie.

18h54 Bernard Ramond demande à son successeur de passer la délibération 3 dans La Provence pour informer le public de la modification du périmètre de la déchetterie intercommunale soumise au vote. La Marseillaise est-elle trop « socialo-communiste », pour reprendre l’expression surannée qu’utilise le médecin à la retraite dans son bulletin pour qualifier la majorité ?

18h57 « Révision simplifiée, terrains pour des logements sociaux et des équipements publics » (délibération 4). Jocelyne Motta, adjointe à la culture tendance PS, intervient la première. Cassante, la petite sexagénaire à la coupe garçonne, s’indigne : « Je voterai la délibération. Mais si je suis favorable à des logements sociaux et à la mixité sociale, je ne les souhaite pas à Léo Lagrange. C’est une zone verte en centre ville et la crèche va accentuer les nuisances dans un quartier qui subit déjà celles de la piscine et du skate-parc. » Le maire tente de rassurer : « Il y aura une concertation la plus vraie, la plus à l’écoute possible. Aucune décision ne sera prise tant que le débat en conseil et la concertation ne seront pas clos. » Piégé, selon lui, par une décision gouvernementale clôturant les modifications des Plans d’occupation des sols à la fin de l’année, l’ancien PDG demande à son conseil l’autorisation de transformer deux zones naturelles protégées en terrains constructibles. Mais sans projets ficelés. Le premier, programmé à côté d’une MJC, ne pose pas de problème, mais le second, situé dans une zone résidentielle, est curieusement moins bien accueilli. Bernard Ramond se régale : « On ouvre la boîte de Pandore ! » Malgré la clim, la température ne retombe pas.

19h04 Sueurs froides de Jacques Bucki. Bernard Ramond vient de demander la séparation des deux projets en deux délibérations pour ne « pas passer pour un anti-social primaire ». Le maire se tourne vers ses services : « On peut la scinder en séance ? »

19h06 Aidé par une majorité visiblement peu informée sur les projets de Jacques Bucki et partagée sur celui concernant Léo Lagrange, l’ex-médecin conseil mord : « Je vous dis clairement qu’on fera un courrier pour faire part de notre étonnement au sous-préfet. C’est quand même 10 000 m2 que vous voulez modifier. » L’argument fait mouche. « Je rejoins Monsieur Ramond : pour une crèche et un complément de logements sociaux, c’est beaucoup », s’inquiète à son tour Gabriel Peyre, adjoint aux sports tendance Lambesc Avenir. Le maire est au supplice : « Le projet n’est pas à l’ordre du jour. Il ne faut pas que le politique prenne le pas dans ce dossier. »

19h09 Totalement désintéressé par le débat qui s’enlise, Bernard Veyrunes, conseiller de la majorité PS, tente à son tour de faire taire le climatiseur. Sans plus de succès que sa collègue. Echec ponctué d’un petit dodelinement de la tête honteux.

19h16 Nouvelle suée du maire. L’opposition vient de demander une suspension de séance. Question inquiète à son administration : « Il y a une procédure ? » Malgré le discours dominant, la gestion d’une commune n’a rien à voir avec celle d’une entreprise…

19h25 Reprise. Bernard Ramond repart à l’abordage des (mauvaises ?) intentions de son successeur, toujours sur le second projet : « Vous nous demandez de vous faire un chèque en blanc ! Vous allez finalement nous présenter quoi ? 1, 5, 10, 100, 200 logements sociaux ? » Exaspération du maire, qui explose : « Je veux bien débattre, mais parfois il faut de l’intelligence ! J’ai dit une fois, deux fois, trois fois qu’il y aurait entre 12 et 16 logements, ce qui sera inscrit dans la délibération ! » Son successeur, éternel : « Ca n’avait pas été affirmé… » Jacques Bucki se passe une main au-dessus de la tête pour illustrer son ras-le-bol et conclut, las : « Je préfère pas répondre. »

19h30 Las de subir les attaques de ses troupes et de l’opposition, le maire abdique en faveur de son premier adjoint (PCF). Quadra au visage grave, Jean-Michel Carretero en profite pour rectifier courtoisement Jocelyne Motta. On sent une majorité soudée…

19h36 Vote : neuf voix contre, dont trois adjoints de Jacques Bucki. Brune gironde et frondeuse muette, Valérie Loubeyre, élue au développement économique tendance Lambesc Avenir, cataloguée à droite, répond par un haussement de sourcils de vierge effarouchée à Yvon Castinel, colistier de Bernard Ramond, qui lui lance un regard amusé.

19h38 Le maire accélère la lecture des délibérations.

19h52 Valérie Loubeyre retrouve son visage désintéressé et hautain affiché depuis le début de la séance.

19h59 Regard noir et voix blanche, Bernard Ramond apostrophe le maire : « Vous ne répondez pas à ma remarque ! » Jacques Bucki ignore une nouvelle fois : « On ne va pas perdre notre temps avec des suppositions. » Dans la foulée, il supprime la délibération 11 de l’ordre du jour.

20h00 Jacques Bucki annonce que la 13 est à son tour retirée. Son prédécesseur insiste, acerbe : « Vous n’avez pas à vous justifier. » Jacques Bucki, tranchant : « Non, il est retiré. »

20h06 Jacques Bucki lève la séance d’un « merci » soulagé. Son interlocuteur du début de conseil se précipite pour lui remettre son argumentaire…

Jean-François Poupelin

(1) Lambesc Pour Tous (PS-PC), Lambesc Avenir (sans étiquette) née d’une scission avec Lambesc Autrement, opposition du précédent mandat (sans étiquette).

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