Tous en campagne ! Ces citadins qui rêvent la vie en vert

juin 2009
Effet de la sinistrose politico-sociale qui plombe un peu l’ambiance en ville ? Les rats des villes semblent de plus en plus envier les rats des champs. Les citadins consomment, pensent ou espèrent « campagne ». Une tendance éphémère – made in écolo business - ou la promesse d’une nouvelle alliance entre urbains et ruraux ?

C’est le produit qui fait fureur : un coffret cadeau, notamment vendu dans les grandes surfaces culturelles, où un catalogue détaille différentes possibilités de séjours et d’activités. On n’offre plus un objet mais du rêve. Signe des temps : la campagne figure au premier plan des attractions et destinations proposées. Corinne Mathè travaille avec la Smartbox, une des principales marques de ce nouveau marché. Aux côtés de ses chambres d’hôtes situées à Lourmarin, dans le très chic Luberon, elle propose une nuit en « roulotte tzigane ». Ses clients ? Des citadins. « Il y a de moins en moins de gens qui vivent en ville par choix, estime-t-elle. Ils y restent de plus en plus par contrainte, pour le travail. En ville, il y a les tensions, le stress, surtout dans le climat politique et social actuel. »

Autre indicateur de l’envie de campagne qui taraude les urbains en manque de chlorophylle : la bonne santé des Gîtes de France au moment même où, pourtant, le secteur touristique bat de l’aile avec la crise. « Nous sommes positionnés sur l’effet retour aux sources, le tourisme durable, souligne Farid Rahal, directeur des Gîtes de France du Var. Nous séduisons les citadins en manque de verdure. Le tourisme à la ferme se développe bien par exemple. » Le label multiplie les déclinaisons : gîtes de pêche, éco-gîtes, gîtes panda. « Ce qui s’exprime aussi c’est le besoin de réseaux sociaux : découvrir l’autre, l’environnement, la chaleur humaine ! », précise, lyrique, Michel Faraut, directeur des Gîtes des Alpes-Maritimes.

Le désir de campagne ne se limite pas à quelques séjours le temps d’un week-end ou d’une semaine. Il recoupe des réalités et des pratiques très différentes. Cela passe paradoxalement par la multiplication des lotissements à la périphérie des villes et des villages qui contribue peu à peu à grignoter les terres agricoles en Provence-Alpes-Côte-d’Azur. Les élus, officiellement friands de verdure comme leurs administrés, ont toujours du mal à résister aux arguments financiers du lobby immobilier. Dans un autre registre, pour les citadins qui n’ont pas moyen de concrétiser leur fantasme, le marketing écolo est là pour proposer des substituts manufacturés.

Parfois même les rats des villes font alliance avec les rats des champs. C’est le système des paniers « bio » que s’engagent à acheter toutes les semaines des « consom-acteurs » pour assure le maintien d’une agriculture de proximité. C’est le réseau « accueil paysan » qui propose gîtes et chambres d’hôtes dans une optique d’échange pour tenter de sortir de la simple prestation commerciale. Ce sont aussi des villages qui, tout en se transformant, se repeuplent et revivent. Et puis, plus de trente ans après le phénomène des néo-ruraux, on assiste aussi à un (re) retour à la terre. Discrètement, quelques « agricollectifs » s’apprêtent à prendre racine…

Michel Gairaud

AU SOMMAIRE

■ Le (re) retour à la terre ■ Entretien : « La culture urbaine s’est imposée » ■ Les métamorphoses d’un village ■ Le bonheur est dans l’accueil ■ La campagne c’est pas bio ■ Quand le désir doit se faire respect ■ Complainte du laboureur bio ■ Ecolo business ■ Vert, couleur de l’espoir

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