Exorcisme & mauvais esprits

juin 2010
Exorcistes contre démons, le combat fait rage jusqu’au coeur des grandes villes. Sors de ce corps, Belzébuth !

Une douleur lancinante et des gargouillis à l’approche d’un crucifix ? Une verrue qui ressurgit dès que vous croisez un prêtre ? L’eau du robinet qui vire jus de boudin ? Il n’y a qu’à appeler un exorciste ! Un conseil qui peut faire sourire, sauf que l’attrait grandissant qu’exercent le paranormal et l’ésotérisme a poussé l’église à s’organiser. Si dans les années soixante-dix, il y avait à peine une vingtaine d’exorcistes, on en compte aujourd’hui cent-vingt à travers la France.

Benoît XVI croyant en l’existence et au danger du Malin a décidé, en 2008, que chaque diocèse aurait un prêtre spécialiste en diableries. Au diocèse de Marseille, on l’appelle communément le père exorciste. Préférant garder l’anonymat « pour ne pas être harcelé », il est depuis 9 ans chargé de contrer les attaques perfides du démon. Et dans l’exercice de ces fonctions, le père exorciste ne chôme pas : « Autrefois, c’est dans les campagnes que l’on croyait à ce genre de phénomènes ; aujourd’hui, c’est dans les villes que le problème s’accentue. Le nombre des « consultants » ne cesse d’augmenter. J’ai cinq rendez-vous par semaine, pour des demandes d’exorcisme, à tel point qu’un autre prêtre doit venir m’aider à mi-temps. »

Si les voix du Seigneur sont impénétrables, celles du Malin prennent des formes diverses : des chansons de Marylin Manson à l’engouement pour la voyance et autres « arts » divinatoires. « Après une visite chez une voyante, beaucoup de gens pensent qu’ils sont maraboutés, c’est aussi le cas de certains jeunes, qui imprudemment s’amusent à essayer de faire tourner des tables. Ils paniquent et viennent nous voir. » Mais gare au quidam suant l’hérésie, le diocèse ne « soigne » que ceux qui ont reçu le baptême. « L’exorcisme, je ne peux pas le réaliser si les gens ne sont pas chrétiens », avoue le père exorciste. Pour les autres, si votre quotidien se résume aux sept plaies d’Egypte avec en sus le triptyque infernal « Tentation, infestation, possession », l’abbé Serge Burglé est là.

Nommé évêque depuis le mois de décembre par la confidentielle Eglise catholique libre (une branche dissidente de l’église catholique romaine qualifiée par des envoûtés de secte), ce père de famille marié exerce son ministère niché au fond d’un HLM du quartier de Barriol, en Arles. « Le conformisme de l’église est affligeant », glisse-t-il dépité. Le verbe volontiers vert, l’évêque Burglé est un curé atypique, jovial et tonitruant. Le bouillant abbé, claque comme nul autre le cul de la chèvre possédée, voire celui de la fermière envoûtée, remplace le vin de messe par du muscat, tutoie volontiers, ordonne les femmes, marie les homosexuels, milite pour les préservatifs et chasse le démon. Et à l’écouter, la société moderne est gluante de menaces surnaturelles.

« Les esprits mauvais existent et vous manipulent, ce sont des cas d’infestations. Parfois, le bétail crève sans raison, des objets se déplacent, des appartements sont hantés parce qu’il y a eu des suicides à l’intérieur », lance l’abbé Burglé. Bel orateur, l’ancien employé d’hôpital psychiatrique ne craint pas, moyennant remboursement des frais, d’affronter Belzébuth à mains nues ou presque, sans abracadabra, mais à coup de prières de délivrance, offertes sans discrimination aux protestants, musulmans, juifs, et, bien sûr, catholiques. « Cette autorité sur les démons, Jésus l’a transmise à ses disciples et nous l’exerçons. » Amen !

Rafi Hamal

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