Emballez, c’est Pezet

novembre 2004
Quand un leader marseillais lorgne sur la mairie d'Aix-en-Provence, le petit monde politique dans les Bouches-du-Rhône s'agite. Et nous prépare une belle pièce en plusieurs actes pour les prochaines municipales. En voici le prélude.

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Michel Pezet, le leader de l’opposition socialiste au conseil municipal de Marseille, laisse de plus en plus clairement entendre publiquement qu’il n’exclut pas de conquérir Aix-en-Provence aux prochaines élections municipales programmées à l’horizon 2007-2008… Ainsi, à 61 ans, le dauphin malheureux de Gaston Defferre, l’ancien président du Conseil régional, aujourd’hui vice-président du Conseil général, pourrait renoncer à s’emparer un jour du fauteuil de l’UMP Jean-Claude Gaudin. Et ce pour les ruelles plus culturelles mais aussi plus sinueuses de la ville d’Aix-en-Provence. « Il y a ceux qui aimeraient me voir partir et ceux qui espèrent me voir arriver… », a-t-il expliqué le mois dernier lors du conseil municipal, évoquant une « rumeur » mais sans chercher à faire semblant de la démentir. C’est en effet ainsi que l’on peut résumer la situation.

Parmi ceux qui souhaiteraient voir partir Michel Pezet de la scène politique marseillaise, figurent en bonne place les socialistes agacés par son concept « d’opposition courtoise ». Au premier rang desquels Patrick Mennucci, lui-même autrefois président du groupe socialiste. De tempérament plus extraverti – sanguin diront certaines mauvaises langues – celui qui fut avec succès le directeur de campagne de Michel Vauzelle aux régionales et de Michel Rocard aux Européennes se verrait bien redevenir la caisse de résonance d’une opposition… plus énergique. Autre personnalité et non des moindres : Jean-Noël Guérini. Le président du Conseil général des Bouches-du-Rhône, auquel on prête un intérêt pour le fauteuil de Jean-Claude Gaudin, ne verrait pas d’un mauvais ?il l’éloignement géographique d’un éternel concurrent. Officiellement, la candidature de Michel Pezet n’a ni le soutien de la fédération socialiste, ni celle de Jean-Noël Guérini qui la contrôle. Interrogé par le Ravi, le président du Conseil général botte en touche : « la question du candidat socialiste pour la mairie d’Aix n’est pas à l’ordre du jour, il faut travailler sur le fond ».

Un « homme de c?ur »

Et puis, il y a en effet ceux qui « espèrent » voir arriver à Aix-en-Provence l’avocat marseillais. Au premier rang desquels, ce qui n’est pas là le moindre des paradoxes, une singulière groupie : l’UMP Maryse Joissains, le maire en titre de la ville ! « C’est un homme de c?ur, garant d’un débat politique de qualité », nous a-t-elle tout de go déclaré, ne tarissant pas d’éloges sur le prétendant socialiste. N’hésitant pas aussi, dans la foulée, à attribuer un autre bon point inattendu : « Jean-Noël Guérini est un homme intelligent, il sait où il met ses pions ». Cet adoubement quelque peu surprenant et empressé est peut-être pour madame le Maire, l’occasion de diviser pendant un temps son opposition. Car – on l’aurait presque oublié ! – il existe déjà un leader de la gauche aixoise : le conseiller général socialiste Alexandre Medvedowsky. « L’arrivée de Michel Pezet serait un parachutage, estime Alexandre Medvedowsky. Je suis le seul candidat légitime à la candidature. Elu depuis quinze ans à Aix-en-Provence, j’y ai énormément de soutiens, parmi lesquels la majorité des militants locaux. Pezet s’est fait manipuler par un certain nombre de gens à Aix. Il va tomber sur un os. » Et le conseiller général de rappeler que, en définitive, ce sera aux militants PS de se prononcer sur le choix de leur leader un an avant les élections. Autant de réticences qui n’ont pas empêché Michel Pezet, accompagné de l’ancien maire socialiste, Jean François Picheral, d’aller directement avertir et d’obtenir, dixit Michel Pezet, l’aval de François Hollande.

Une doublette Perreti-Pezet

Mais le microcosme politique aixois – aux richesses inépuisables – recèle également une autre division, au sein de la droite cette fois-ci. « Maryse Joissains, ce n’est pas la droite, c’est la honte de la droite », nous déclare par exemple l’UDF, François Xavier de Perreti. Et de dénoncer dans la foulée « l’échec flagrant dans la gestion de cette ville, qui aiguise les appétits extérieurs ». Convaincu, qu’ « il y a un combat de salubrité publique à mener dans cette ville » François-Xavier de Peretti a déjà mis en place sa propre machine de guerre : l’association Union pour Aix. Une structure qui est destinée à rassembler le plus largement possible à droite comme à gauche, avec comme noyau central, bien sûr, l’UDF. Faire de la politique autrement pour le jeune leader local de l’UDF, c’est rassembler au delà des partis.

La sociologie d’Aix-en-Provence est en effet quelque peu particulière. Bastion d’un conservatisme ouvert et modéré, c’est au centre que s’y construit le pouvoir. L’ancien maire socialiste, Jean François Picheral, l’avait fort bien comprit. En atténuant sa couleur politique, il avait réussi dans le consensus à faire une large unanimité autour de sa personne. Michel Pezet, au profil sensiblement identique, se verrait probablement bien, à l’image d’un Bertrand Delanoë à Paris, conquérir Aix, en rassemblant sur son nom des électeurs non socialistes et sur des thèmes environnementaux et de qualité de vie. Mais il serait, ce faisant, confronté au choix suivant : exclure une partie de la gauche, pour une fraction de la droite.

Même s’il y a assez loin des déclarations d’intentions à la réalité des listes, laisser une porte ouverte n’est jamais inutile en politique même si, en définitive, les stratégies se font toujours à chaud, compte tenu des rapports de force immédiats. Aix-en-Provence, réputée pour ses représentations théâtrales, nous prépare d’ici 2007-2008, une pièce en plusieurs actes dont la représentation a déjà commencé. Pour preuve : il y a quelques temps de ça, François-Xavier de Peretti était en procès face… au couple Joissains, représenté par son avocat… maître Michel Pezet. C’est la doublette Peretti-Pezet qui a gagné. Faut-il y voir un présage ?

Rafi Hamal

Joissains pense à l’après Gaudin

Les rumeurs vont bon train au sein de l’échiquier politique aixois. Maryse Joissains, élue surprise en 2001, pourrait, selon certaines spéculations, renoncer à concourir pour un second mandat. Bénéficiant de la loi sur la parité, elle serait davantage intéressée par un siège plus moelleux et moins polémique au Sénat. Interrogée par Le Ravi, Maryse Joissains ne dément ni ne confirme cette hypothèse. Et préfère évoquer un vif intérêt pour un mandat à… Marseille. « Vous savez, il y a plus d’aixois qui vont travailler à Marseille que l’inverse, et puis la cité phocéenne est la ville la plus corse de France. Et je suis corse ! ». Affirmation, pour le moins surprenante, dans la bouche d’une élue au parcours résolument atypique : communiste par tradition familiale, c’est le monde universitaire qui lui a fait découvrir les charmes du libéralisme en l’entraînant chez les radicaux valoisiens puis à l’UMP. « Je n’exclus pas de me présenter un jour à Marseille mais bien sûr après l’ère Gaudin ! », précise Mme le maire. Nous voilà rassurés ! Mais tous les prétendants à la succession du chef incontesté de la droite locale ne le seront peut-être pas… Une nouvelle prétendante – qui n’a ni froid aux yeux, ni sa langue dans sa poche – pourrait entrer dans la danse…

R.H.

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