24 tonnes = « quelques dizaines de kilos »

septembre 2005

« Quelques dizaines de kilos » : c’est, selon la mairie de Nice (1), la quantité totale de produits contaminés à l’amiante qui a été retirée avant destruction des casernes Saint Jean d’Angély à Nice. On sait aujourd’hui qu’il n’en est rien.

Rappelons que ces casernes, dont une partie était occupée par un collectif d’artistes, furent précipitamment détruites à la fin de l’année dernière, afin précisément de couper court aux nombreux recours formulés par le collectif contre son expulsion. Trop précipitamment peut-être : depuis cette expulsion, une association, SOS amiante 06, s’est constituée afin de faire la lumière sur la présence ou non d’amiante dans ces bâtiments. La question n’est pas anodine, tant fut important le nuage de poussières produit par cette destruction et qui a recouvert une partie du quartier Saint Roch. Plus d’une centaine de plaintes de riverains pour « mise en danger de la vie d’autrui » ont ainsi été déposées sur le bureau du procureur de Montgolfier qui a ouvert une enquête préliminaire. Depuis, la mairie tente de dénouer la polémique en soutenant mordicus que l’inspection fut correctement menée, que donc « quelques dizaines de kilos » d’amiante furent effectivement retirés et la destruction opérée avec les précautions nécessaires.

Comment expliquer alors que les bordereaux de suivi de déchets, dont l’association SOS amiante s’est procurée une copie via la CADA, mentionnent le retrait de 24 tonnes de matériaux amiantés ? Plus inquiétant encore, l’un des bordereaux fait état de « 1,32 Tonnes d’amiante friable, pulvérulente et de classe 1 » retirées le 20 décembre 2004. Or, rappellent les responsables de l’association, décidément devenus incollables pour tout ce qui concerne l’amiante, « pour enlever ce type d’amiante, non seulement les intervenants doivent revêtir une tenue spéciale, mais les locaux doivent être “empaquetés” dans un film protecteur, uniquement accessible par deux doubles sas, celui de sortie conduisant à une douche de décontamination. Un système de compresseur doit créer une dépression à l’intérieur de cet ensemble et fonctionner sans interruption 24 heures sur 24 de façon à ce qu’aucun grain de poussière ne puisse s’échapper. Sans discontinuer une centrale de traitement doit filtrer l’air avant de le rejeter à l’extérieur purifié à 99,998%. » Si un tel dispositif a été mis en ?uvre, ce fut très discrètement et sans témoins…

Et peut-être y avait-il encore de plus grandes quantités de matériaux contaminés dans ces bâtiments. En effet, avant toute destruction, c’est à une inspection approfondie qu’il eut fallu procéder, avec notamment des prélèvements destructifs. Or, soutient SOS amiante, l’inspection ne fut que superficielle, les seuls prélèvements destructifs ayant été fait à la demande du collectif d’artistes. Et depuis, la Ville de Nice a interdit à l’APAVE, qui a effectué ces prélèvements, d’en communiquer les résultats à ses commanditaires.

Face à de telles accusations, la mairie ne pouvait rester inerte. Son fonctionnaire en charge de ce dossier, Hervé de Surville, récemment décoré de l’Ordre national du mérite, a donc attaqué en diffamation les responsables du site internet de l’association dans lequel était écrit que « les représentants de la Mairie niaient le problème [de l’amiante], allant jusqu’à mentir de façon éhontée ». L’audience aura lieu le 8 septembre. Voilà qui devrait rassurer les riverains des casernes.

GM

(1) Nice Matin, 17/02/05 (2) Lire Le Ravi n° 16 et 17

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