Edito

mai 2005

Mais non, mais non…

Périlleux exercice. Votre valeureux éditorialiste écrit ces lignes un mois, jour pour jour, avant le référendum sur la Constitution européenne qui aura lieu le 29 mai. Et le journal que vous tenez entre les mains sera en kiosque jusqu’au 2 juin. C’est-à-dire après que le résultat soit déjà connu. Comment dans pareilles conditions prédire l’avenir et vous révéler sans se tromper, en exclusivité provençalo-franco-mondiale, l’issue du scrutin ?

Première option, les sondages. Franche hilarité. Pour l’heure, le soleil brille, le vent souffle modérément, mon chat se lave l’oreille gauche avec sa patte, et toutes les études d’opinion donnent le « non » gagnant. Ce qui a pour effet de mobiliser à bloc les partisans du « oui », particulièrement nombreux dans les états-majors politiques et les médias. Au point de renverser au dernier moment la tendance ? En attendant, la Sofres, Louis Harris, BVA et les autres instituts tournent à plein. Rappelons-le, ils vendent au prix fort leurs enquêtes. Le discrédit qui avait frappé ces Cassandres des temps modernes après leur incapacité à prévoir l’élimination de Lionel Jospin au 1er tour des élections présidentielles, fut donc de courte durée. L’éternel revenant du parti socialiste ne semble d’ailleurs pas s’en émouvoir outre mesure…

Autre possibilité pour satisfaire votre curiosité malsaine, allumer un cierge dans une église et attendre l’illumination, tel Paul Claudel appuyé sur un pilier de Notre-Dame. Oui mais voilà. D’abord le temps nous manque. Ensuite, nous avons publié quelques dessins et chroniques peu amènes sur la médiatisation de la mort de Jean-Paul II. Nous avons persiflé sur l’instrumentalisation de sa longue maladie par la bureaucratie ecclésiastique. De plus, pour tout vous confesser, son successeur, Benoît XVI, nous impressionne un peu. Les vaticanistes ont beau être formels : depuis qu’il a revêtu sa nouvelle robe, Ratzinger ne serait plus le « panzercardinal », le Préfet de la Congrégation pour la doctrine de la Foi, héritière de la Sainte Inquisition. Mais rien n’y fait, le doute demeure. Et si nous sommes héroïques, ce n’est pas au point de finir sur un bûcher.

Haut les coeurs. Nous avons fait appel à l’ultime recours du journaliste, son arme fatale : le Sociologue. Politologue de surcroît. Et pas le moindre : Jean Viard, directeur de recherche CNRS au Centre d’étude de la vie politique française à Sciences-po Paris, fondateur des éditions de l’Aube, sises dans le Vaucluse. « Quels résultats pouvons-nous attendre en Paca ? », avons-nous interrogé, n’hésitant pas à régionaliser la question, soucieux de coller au terrain et de vous fournir l’information de proximité dont vous rêvez la nuit. « Notre région survalorise toujours les votes protestataires, comme ce fut le cas lors du référendum sur Maastricht, nous a répondu avec courtoisie l’éminent spécialiste. Le non devrait donc l’emporter plus largement. Mais si par hasard le oui domine en France ce sera plus grâce à la Bretagne qu’à la Provence. » CQFD. Comment ? J’en vois au fond qui ne sont pas contents… Qu’espériez-vous exactement de notre part ? Des révélations ? Une prophétie ? Un appel à pendre le dernier commissaire européen avec les tripes du dernier technocrate ? Une mise en garde solennelle sur l’effroyable tsunami politique tapi au fond des urnes en cas de victoire du « non » ? Pourquoi pas une consigne de vote tant qu’à faire ! Alors, çà ! Oui ! Mais non, mais non… Le Ravi

Pages 6 à 8, cinq élus, en majorité favorables au « oui », répondent aux questions de huit fédérations, associations et syndicats, en majorité favorables au « non ». Comme dans la vraie vie en quelque sorte. Bonne lecture !

Prochain numéro en kiosque dès le vendredi 3 juin 2005

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