Marseille : Promesses à crédit

juillet 2007
MARSEILLE. La première ligne du tramway à peine sur les rails, la deuxième en chantier jusqu'en 2008, Jean-Claude Gaudin promet déjà une extension. Reste à la communauté urbaine de Marseille à trouver les moyens de la financer...

« Il faut d’abord digérer les deux premières lignes ! » (1) Depuis la mise en service de la première ligne de son tramway (Caillols-Joliette), Jean-Claude Gaudin, sénateur-maire UMP de Marseille et président de l’intercommunalité Marseille Provence Métropole (MPM), est repu, gavé de transports et surtout, à la tête de deux collectivités au bord de l’implosion financière. Pourtant les municipales approchant, il doit encore promettre de nouvelles festivités. « Je m’y engage, pendant le 3e mandat, nous ferons, avec la communauté urbaine, la troisième ligne en direction du 4 Septembre [à partir de la place Castellane, Ndlr] », ne cesse-t-il de répéter dans les colonnes de La Provence. 12rv43red_toul.jpg Comment ? Le sénateur-maire de Marseille reste obstinément silencieux sur cette question. Par contre, il est beaucoup plus disert lorsqu’il s’agit de rappeler le montant du projet : 468 millions d’euros pour les trois lignes. Sans compter un petit supplément de 36 millions d’euros qu’il rechigne, la plupart du temps, à dévoiler (2). Une note plutôt salée ! D’autant que ses partenaires sont, à son goût, un peu trop radins. « Sur les deux premières lignes, l’Etat a donné 60 millions d’euros. Mes amis avaient décidé qu’on n’aidait plus les transports in situ, ce qui nous avaient fait hurler. Chez nous, le Conseil régional donne 27 millions d’euros, soit 3 % du budget. Le Conseil général pareil », ne cesse de geindre Jean-Claude Gaudin. Pour ne rien arranger, la participation des collectivités locales concerne également le prolongement de la ligne 1 du métro. Un chantier d’au moins 350 millions d’euros qui devrait être achevé en 2009.

Pour payer les deux premières lignes, MPM s’est donc endettée. Et pour longtemps. « 30 à 50 ans », concède Jacques Rocca-Serra, adjoint aux transport à Marseille, pour qui rien ne semble exceptionnel : « Toutes les communautés urbaines fonctionnent de cette manière. Sur ce genre d’infrastructures, l’endettement se programme toujours sur une longue période. Nous payons encore le métro de Gaston Deferre inauguré en 1977 ! ». En 2005, la Chambre régionale des comptes avait pourtant révélé une situation plus que précaire de MPM. Une mauvaise interprétation selon Jacques Rocca-Serra : « Nous n’avons pas plus de difficultés que les autres. Nous sommes juste un peu plus jeunes. Il ne faut pas confondre les dépenses de fonctionnement et les investissements. Sur ce point, nous avons moins de problèmes ».

Même s’il ne conteste pas le règlement des deux premières lignes du tramway, François-Noël Bernardi, président du groupe socialiste à la communauté urbaine, est loin de partager l’enthousiasme de l’adjoint aux transports sur les capacités de la collectivité locale à financer de nouvelles infrastructures. « Jean-Claude Gaudin signe des chèques en blanc sur les programmes de MPM. Il y a deux milliards d’euros (3) d’autorisation en stock et elle ne peut investir que 150 millions par an. Aujourd’hui, elle ne peut rien payer : elle n’a pas d’épargne et les emprunts remboursent les emprunts », assure le conseiller communautaire (4). La volonté affichée par Jean-Claude Gaudin « de limiter les remboursements d’emprunt » pour sa 3e ligne de tramway semble lui donner raison.

Alors, comment financer le prolongement si, comme l’affirme François-Noël Bernardi, « MPM n’a pas un euro pour le prolongement » ? Le partenariat public privé (PPP) rétorquent Jean-Claude Gaudin et son premier adjoint, Renaud Muselier. Une solution déjà très en vogue à Marseille (L2…), qui a l’avantage de faire peser l’investissement sur un opérateur privé. Autre atout pour MPM : le « PPP » pourrait calmer les maires de la communauté urbaine, peu enclins à payer pour des infrastructures que leurs habitants utilisent peu, comme le prouvent les ardoises de MPM à la régie des transports marseillais (5). Mais comme pour toute solution de pauvre, les intérêts sont colossaux, beaucoup plus que pour un simple emprunt. Et inévitablement à la charge des contribuables.

J-F. P.

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