Ecrire pour faire parler

décembre 2019 | PAR Frédéric Legrand
A Paris comme à Béthune, Macao Ecritures retisse les liens entre les habitants par l'art-thérapie.

Dans le quartier Kellerman-Amiral Mouchez, près du parc Montsouris, on n’a pas de problème de logement. Mais au cœur de cet ensemble HLM géré par la ville de Paris, l’association Macao écritures assure une autre mission : animer l’espace de vie du quartier pour retisser des liens entre les habitants, par l’art-thérapie. « C’est la Fondation Abbé Pierre qui nous a contactés et nous a mis en relation avec l’Opac et la Caf, se souvient Isabelle Ferré, urbaniste de formation et fondatrice de l’association. Dans le quartier on n’est pas dans un enjeu du mal-logement, mais dans l’utilisation qui est faite du logement. » Originaires du Maghreb, d’Afrique sub-saharienne et d’Asie, les communautés du quartier vont et viennent, se croisent peu. « Il y a même plutôt du racisme, sauf entre les enfants pour lesquels il y a un mélange grâce à l’école », souligne Isabelle Ferré. Le 13e arrondissement vit depuis plusieurs années des phénomènes de rixes entre bandes, ayant causé la mort d’un jeune l’année dernière et l’hospitalisation en coma d’un autre cette année.

Partir du désir de chaque habitant

En proposant des pratiques artistiques individualisées et basées sur le désir de chaque participant, Macao écritures travaille « à ce que chacun découvre et comprenne l’autre ». « S’engager avec la Fondation est une évidence tant nous partageons les mêmes valeurs, estime Isabelle Ferré. Cela nous donne aussi plus de marge de manœuvre pour élaborer notre projet, en nous rendant plus autonomes financièrement et en nous crédibilisant par rapport aux autres financeurs. » En participant aux Rencontres nationales des acteurs organisées par la Fondation, Macao écritures a rencontré d’autres structures avec lesquelles elle développe d’autres projets. Notamment celui d’un mini reportage réalisé par des habitants sur le Lavoir, qui propose des lavomatics à prix abordable au sein d’un lieu de vie avec café et ordinateur, dans le quartier du Faubourg, à Béthune (Pas-de-Calais).

Le Lavoir a déjà mené de son côté plusieurs projets avec des acteurs d’autres régions, rencontrés lors des journées partenaires de la Fondation. « Didac’Ressources, une association marseillaise, nous a accompagnés pour créer et enrichir la page Wikipedia de notre quartier, pour la valoriser et lutter contre la stigmatisation, détaille Driss Farahy, directeur du Lavoir. Nous avons mobilisé les habitants pour récupérer des informations et aller aux archives départementales, en étant attentifs à n’utiliser que des sources fiables. »

Présentée lors des journées du patrimoine 2019, la page compte aujourd’hui plus de 12 chapitres et 2 600 mots, et est actualisée régulièrement. Ce projet culturel en ligne, une première pour le Lavoir, s’insère, comme à Paris pour Macao Écritures, dans les actions initiées par les partenaires de la Fondation après les rencontres consacrées au pouvoir d’agir des habitants. Une logique que Malika Chafi, responsable de la promotion des habitants au sein de la Fondation, appelle une « fertilisation croisée ».