Jeunesse d'une Femen

avril 2020 | PAR Michel Gairaud

On ne naît pas Femen, on le devient. Inna Shevchenko, réfugiée en France depuis 2013 – elle avait alors 23 ans – préside désormais le mouvement féministe international. Pour retracer les origines de son engagement, elle s’est associée à Simon Rochepeau, scénariste, et à Thomas Azuélos, dessinateur marseillais. Les auteurs ont déjà signé ensemble deux beaux albums, ici chroniqués : La ZAD, c’est plus grand que nous et L’Homme aux bras de mer. Avec ce premier volet d’un diptyque consacré à la jeunesse et à l’adolescence de la future Femen, ils nous plongent dans l’Ukraine des années 90, pays sans repère après l’effondrement de l’URSS, ravagé par la pauvreté, aux mains des mafias et d’une classe politique corrompue. Inna, entre sa 6ème et 14ème année, n’est pas encore la militante intrépide aux seins nus défiant le patriarcat, les religions et luttant pour la démocratie. Mais elle se passionne déjà pour la politique, en pleine révolution orange, et n’a pas froid aux yeux. L’album parvient à conjuguer l’intime, en privilégiant le crayon gris rehaussé par des éclats de couleurs, et la « grande » Histoire. Il est surtout celle de l’émancipation, individuelle et collective, d’une génération. Grâce à Prénom : Inna, elle est un peu plus la nôtre aussi…

Prénom : Inna. Une enfance ukrainienne, par Thomas Azuélos, Inna Shevchenko, Simon Rochepeau, éditions Futuropolis, 104 pages, tome 1/2, 18 euros.