Voyage intime

novembre 2021 | PAR Michel Gairaud

C’est le livre d’une vie. Monumental mais qui pourtant, comme l’annonce son auteur, restera inachevé. Edmond Baudoin, né à Nice et toujours très attaché à Villars-sur-Var son village d’enfance sur les hauteurs des Alpes-Maritimes, va souffler en avril sa 80e bougie. Il est, en France, chez Futuropolis puis chez L’Association qui l’édite aujourd’hui, le précurseur du roman dessiné autobiographique. Les fleurs de cimetière qu’il annonce en titre de son épais album – 288 pages grand format – ce sont les petites taches brunes qui apparaissent sur la peau en vieillissant. Son voyage dans le temps – jalonné par dix auto-portraits parsemés au fil des pages et des années – pourrait sembler narcissique et un tantinet morbide. La BD – en noir et blanc éclairée dans une soixantaine de pages par des éclats de couleurs – assume sa part d’ombre et de nombrilisme. Car Baudoin ne s’épargne guère et n’esquive pas ses lâchetés : celles d’un père souvent absent, celles d’un homme ouvertement polygame, qui préfère quitter une femme plutôt que de prendre le risque de moins l’aimer un jour… Son récit intime, rythmé par de majestueuses planches d’arbres et de racines, touche par sa sincérité, sa puissance esthétique et sa force poétique.

Les Fleurs de cimetière, d’Edmond Baudoin, éditions L’Association, 288 pages, 30 euros